- PROPOS DU P. D'ALZON RAPPORTES PAR H. GALERAN
- En récitant les psaumes
- H.D. Galeran, Croquis du P. d'Alzon, B.P. (1924)
- Extrait de "En promenade", dans *Croquis du P. d'Alzon*, p.238-240.
- ** Aucun descripteur **
- Abbé Galeran
- GALERAN
- mai 1849
- may 1849
- Nîmes
C’était en 1949; un premier jeudi du mois de mai. […], le P. d’Alzon vint me prendre dans la cour pour l’accompagner en promenade et réciter le bréviaire avec lui. […]
Nous en étions à Laudes, au Benedicite. Le Père, s’arrêtant tout à coup, saisi par le charme du beau spectacle de la nature, leva les yeux au ciel en s’écriant:
– O mon Dieu! que votre ciel doit être beau, puisque votre terre est si belle! les fleurs s’ouvrent sous votre regard; les oiseaux vous louent par leurs chants; les insectes bourdonnent pour vous remercier. Il n’y a donc que l’homme qui ne veuille pas chanter son Benedicite ou qui le chante mal quand il consent à vous l’offrir? Les méchants vous oublient, ils ne voient pas la main qui a richement paré la terre. Mais est-ce que les bons eux-mêmes vous louent comme vous le méritez?
Puis se tournant vers moi:
– Enfant, dit-il, appliquons-nous à bien louer notre Dieu. Ne permettons pas au soleil, aux plantes, aux fleurs, aux oiseaux de l’emporter sur nous en hymnes de louanges, en reconnaissance muette ou accentuée. Nous avons, nous, un coeur et une langue: un coeur pour sentir, une langue pour exprimer ce que nous sentons…
La récitation du bréviaire terminée, le Père me communiqua cette pensée.
– En récitant les psaumes, nous avons parlé à Notre-Seigneur et Notre-Seigneur nous a parlé. Ces conversations coeur à coeur – plus intimes encore dans la méditation – m’ont toujours frappé comme un avant-goût des joies du ciel. Vous ne le savez peut-être pas, enfant, mais je puis vous assurer combien il est difficile de prêcher sur le ciel. Eh bien! quand vous voudrez avoir un avant-goût du ciel, quoique en quantité infinitésimale, mettez-vous en contact direct avec Notre-Seigneur. Demandez-lui, dans la prière ou la méditation, un de ces entretiens intimes, d’une suavité inexprimable, qu’il accorde à ceux qui lui disent avec foi et amour: Loquere, Domine, quia audit servus tuus! Vous n’entendrez pas sa voix, ce n’est pas nécessaire; vous sentirez tout votre être pénétré et rempli d’une douceur, d’un parfum dont rien au monde ne peut donner l’idée. Vous le sentirez, lui, près de vous; vous éprouverez un saint frémissement causé par sa divine présence; vous direz avec Pierre sur le Thabor: Domine bonum est nos hic esse! Les grands saints ont été ravis en extase par l’intensité de cette délectation. Supposez maintenant un tel entretien prolongé pendant des heures, des jours, des semaines, des années, dans une progression ascendante, sur ce principe « que toute force constante est de sa nature accélératrice, puisqu’elle s’ajoute continuellement à elle-même »; ce ne sera pas encore le ciel, mais vous aurez une idée de ce que doit être le ciel…