- OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES. APPENDICE
- DE LA VOLONTE
[Ia - IIae, q. 6-9.] - Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1927, II, p. 363-365.
- BH 5
- 1 ACTES HUMAINS
1 BIEN SUPREME
1 BONTE MORALE
1 LIBERTE
1 PASSIONS MAUVAISES
1 TRIPLE CONCUPISCENCE
1 VOLONTE - 1875
I. -Le grand privilège de l’être intelligent, c’est d’être capable de se mouvoir, d’agir de son propre fond, dans un but raisonnable et connu. C’est là ce qui constitue, avec la volonté humaine, l’acte humain. Sans raison et sans volonté, l’acte humain n’existe pas. Plus l’acte que j’accomplis est voulu par une raison réfléchie, plus l’acte est parfait. A moi de voir quel degré de perfection je puis donner à mes actes par la perfection de ma volonté, surnaturalisée par une intention supérieure.
II. -Privilège admirable! Ma volonté ne peut être forcée, car si elle est forcée, si elle subit violence, elle n’est plus volonté, puisque la volonté est la faculté de se mouvoir par soi-même, d’agir par un principe intrinsèque, dans un but raisonnable. Je puis être matériellement contraint, mais ma volonté peut toujours résister. Hélas! dans combien de circonstances ne l’ai je pas affaiblie moi-même par les influences que je subissais volontairement, par la tyrannie des passions! Et alors, comme je tombais par l’effet des dispositions de mon âme sous les coups de la violence intérieure! Car c’est de celle-là qu’il s’agit pour moi.
III. -La concupiscence par sa corruption, l’ignorance par ses ténèbres, produisent en moi la suspension de la volonté. Et alors, je suis coupable si la concupiscence n’a pas été suffisamment combattue, si l’ignorance n’a pas été supprimée, lorsque je le pouvais. Ah! que d’illusions sur ces deux points seront peut-être dissipées un jour, pour mon châtiment!
IV. -Sans doute, les circonstances modifient, dans les actes humains, les appréciations d’après lesquelles on les juge; il faut [donc] que j’en tienne compte, et l’on peut longuement raisonner là-dessus. L’essentiel est que, quelles que soient les circonstances, ma volonté soit parfaitement droite pour aller à Dieu, dans la lumière la plus pure et la plus capable d’éclairer ma raison.
V. -Si je considère le bien dans son acception la plus générale, le bien est ce que tous les êtres désirent. La volonté ne peut pas ne pas vouloir le bien, mais quel est le bien de la créature raisonnable? Voilà où plusieurs se trompent. Ne me suis-je pas moi-même bien souvent trompé dans la recherche de ce qui était mon vrai bien, et ma volonté ne s’est-elle pas dirigée à faux?
VI. -Ma volonté, sans violence, peut être mue [d’une certaine manière] par mon intelligence, par mes appétits, par certaines répugnances: alors, elle est poussée [soit à vouloir, soit} à ne pas vouloir. Mais le seul principe extérieur qui influe sur ma volonté, c’est Dieu, non pour lui faire violence, car ce ne serait plus ma volonté, mais parce que Dieu est l’auteur et de ma volonté et de mon intelligence, et que, de plus, Dieu est le seul vrai bien général. Pour que ma volonté, en cherchant son bien, ce qui est son inclination naturelle, puisse le trouver, il faut qu’elle le cherche en Dieu seul, et tel est le penchant que Dieu, qui l’aime, lui a donné.
O Dieu, faites que je vous veuille toujours! Soyez le mobile de ma volonté et que j’aille dans tout l’élan dont je suis capable vers vous qui êtes mon bien infini, éternel (1).
Il est intéressant d'examiner la façon dont le P. d'Alzon montrait à ses novices l'usage qu'on peut faire de la Somme de saint Thomas pour la méditation, même à propos des théories les plus abstraites. -Les trois premiers articles de la question VI sont de la pure philosophie (si on trouve le volontaire dans les actes humains, si on le trouve dans les animaux, s'il existe sans aucun acte soit extérieur, soit même intérieur); ils fournissent au Père la première considération de sa méditation. -La seconde a trait aux deux articles suivants: l'action de la violence et de la crainte sur la volonté. -La troisième médite sur la concupiscence et l'ignorance, deux autres agents qui influent sur la volonté et que saint Thomas étudie dans les deux derniers articles de la question VI. -La quatrième médite sur les circonscanes (q. VII), sans s'inquiéter aucunement de les définir (art. 1), ni de savoir si le théologien doit les étudier (art. 2), ni si Aristote les a bien classées (art. 3), ni quelles sont les principales (art. 4), toutes choses certainement importantes, mais peu propres à l'oraison. -La cinquième passe aux actes par lesquels la volonté se porte vers la fin (q. VIII), donc vers le bien réel ou apparent (art. 1), donc aussi vers les moyens qui conduisent à la fin (art. 2), mais non par le même acte (art. 3). -La sixième s'occupe du motif ou du moteur de la volonté (q. IX), et saint Thomas en examine six: l'intelligence (art. 1), l'appétit sensitif (art. 2), la volonté elle-même (art. 3), un principe extérieur (art. 4), les corps célestes (art. 5), enfin Dieu, le seul principe extérieur qui la puisse mouvoir (art. 6).
Ce n'est pas, évidemment, en quelques phrases que de si profondes théories peuvent être élucidées. Aussi le Père se contente de fixer l'attention de ses novices sur une ou deux pensées qui peuvent leur fournir une très longue et très pieuse oraison, d'autant plus fructueuse que ces méditations faisaient suite aux explications données en classe et étaient comme le fruit des leçons du cours.