- OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS SUR NOTRE-SEIGNEUR DANS L'EUCHARISTIE
- JESUS NOTRE DIEU
- Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 493-498.
- BH 5
- 1 ADORATION DU SAINT-SACREMENT
1 AMOUR DE JESUS-CHRIST POUR LES HOMMES
1 AMOUR DU CHRIST
1 BIEN SUPREME
1 CHATIMENT DU PECHE
1 CORPS DE JESUS-CHRIST
1 DIVINITE DE JESUS-CHRIST
1 ESPERANCE
1 EUCHARISTIE
1 FOI
1 HUMILITE DE JESUS-CHRIST
1 IMMORTALITE DE L'AME
1 LUTTE CONTRE LE MONDE
1 MYSTERE
1 PERFECTIONS DE DIEU
1 PUISSANCE DE DIEU
1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
1 RECONNAISSANCE
1 SACRILEGE
1 SAINTE COMMUNION
1 VERBE INCARNE
1 VERTU DE PENITENCE
2 JEAN, SAINT - 1875
Avant d’être pain eucharistique, avant d’être fait chair, le Verbe est Dieu. Dans le Saint Sacrement et dans l’humanité du Christ, il y a toujours la personne divine, il y a Dieu, seconde personne de la Saint Trinité; or, Dieu veut être adoré.
L’adoration de l’Eucharistie revêt un triple caractère de foi, d’espérance et d’amour, qu’il ne faut point oublier en face du sacrement par excellence.
I. Adoration en esprit de foi.
J’adore l’hostie. Mais quoi! je n’aperçois qu’un morceau de pain! Et ce pain peut être profané! Il l’est. Sumunt boni, sumunt mali(1). Le pécheur, l’indigne, l’hérétique, l’apostat le reçoivent. Oui, certainement, et ma foi ne doit point se laisser ébranler par leur impunité temporaire.
Dans la communion je reçois l’être de Dieu, qui se communique à sa pauvre créature par les moyens qu’il sait; mais il est sûr que je reçois la divinité. La raison se trouble, et pourtant Dieu qui m’a créé ne peut-il pas se donner à moi par les voies qui lui plaisent? Ai-je jamais compris mon origine, mon existence, la mort? Tout cela, c’est l’action de Dieu sur moi, et Dieu tout-puissant ne pourrait pas inventer des moyens nouveaux de se donner à moi? et j’oserai dire que, parce que je ne comprends pas, Dieu ne peut pas agir sur sa créature de telle ou telle [façon}? Manière insensée de raisonner. Ce que Dieu me demande, c’est d’adorer et de croire.
Non, Seigneur, je ne me retirerai pas de vous, quoique vous proposiez à ma raison des mystères au-dessus de sa portée. Je ne dirai pas comme les Juifs, à qui vous révéliez la nécessité de manger votre chair et de boire votre sang: Durus est hic sermo, et quis potest eum audire(2). Je crois, Seigneur, et j’adore. Je crois à votre puissance. Vous avez dit et tout a été fait; vous dites et vous faites des choses très nouvelles: Ecce nova facio omnia(3). C’est, en effet, un prodige très nouveau qu’un Dieu caché sous l’apparence d’un peu de pain, nouveauté à quoi m’avait préparé un Dieu fait homme, couché dans une crèche, étendu sur une croix; et cette autre nouveauté n’avait-elle pas été préparée par la manifestation de Dieu dans la création? d’un dieu infini se manifestant dans l’univers, dont le caractère est la limite?
O Dieu, je crois, j’adore votre puissance sous les voiles eucharistiques! O Dieu, je vous [y] adore parce que vous voulez m’y montrer à quel point vous êtes mon Dieu. Dixi Domino: Deus meus es tu(4).
II. Adoration en espérance.
Corpus Domini nostri Jesu Christi custodiat animam tuam in vitam aeternam(5). Voilà le gage par excellence de ma destinée. Jésus-Christ, en se donnant à moi, veut que je sois immortel comme lui.
Mon âme est immortelle, je le sais; mais entre l’immortalité naturelle pour laquelle Dieu a formé la portion la plus noble de mon être et l’immortalité surnaturelle, heureuse, sans préoccupation, dans la vie véritable, dont le bien, la jouissance est Dieu, quels abîmes! Or, ces abîmes, Jésus venant en moi pour être ma résurrection et ma vie, m’aide à les franchir. Jésus-Christ ressuscité d’entre les morts ne meurt plus, et le chrétien qui se nourrit du corps de Jésus-Christ ressuscité est destiné à ne pas mourir davantage. Arrière l’enfer! Le corps de Notre-Seigneur Jésus-Christ garde mon âme pour la vie éternelle.
Mais à une condition, c’est que je vivrai de la vie de Jésus-Christ ressuscité, que je n’aurai de goût que pour les choses d’en haut et que je n’en aurai pus pur les choses de la terre, et que toute mon espérance sera en Dieu par Jésus-Christ.
O Jésus, je vous adore quand vous venez à moi et que vous me promettez la vie. En dehors de Dieu peut-on trouver autre chose que la mort? C’est vous qui êtes l’être par excellence, parce que vous êtes le bien sans limite. L’être infini c’est vous, le bien infini c’est vous, la vie infinie c’est vous. L’être, le bien, la vie, c’est une seule chose très simple et très infinie en vous; et l’être, le bien, la vie, vous voulez que je les reçoive de votre plénitude: et de plenitudine elus omnes nos accepimus(6). O être, ô bien, ô vie divine, je vous adore dans l’attente de vous posséder éternellement, avec surabondance, parce que je commence à vous posséder et à vous adorer en espérance dans l’Eucharistie.
III. Adoration en amour.
Jésus-Christ m’a aimé, et quelle plus grande marque d’amour, après s’être fait homme pour moi, après être mort pour moi, [que] de se faire aliment et breuvage pour moi? Ah! je puis bien dire de Jésus-Christ, ce que Jésus-Christ a dit de son Père: Sic Deus dilexit mundum(7): voilà jusqu’à quel point Dieu a aimé le monde! Ah! qu’il faut bien qu’il [soit] jaloux de mon amour pour venir le solliciter sous une pareille forme. Un peu de pain que les insectes dévorent, que les animaux foulent aux pieds, que l’homme sacrilège profane! Et pourtant, vous êtes mon Dieu dans l’Eucharistie, sous la dent de l’insecte, sous les pieds de l’animal, dans la poitrine du sacrilège. Oh! Jésus, quels dédommagements pleins d’amour et d’adoration ne vous dois- je pas? Quelles réparations n’avez-vous pas le droit d’exiger? O Dieu! si la créature coupable me force à payer en amour ce qu’elle vous ôte d’hommages par ses crimes, moi-même que ne dois-je pas à votre amour prévenant à titre de reconnaissance? Ah! oui, vous m’avez traité avec trop d’honneur quand vous avez institué l’Eucharistie: *Nimis honorati sunt amici tui, Deus(8), et c’est pour cela que je veux vous rendre tout l’honneur que je suis capable d’apporter à mon Dieu par une adoration plein d’amour, et de tendresse, et de reconnaissance.
Seigneur, que ma perfection, après vous avoir reçu, consiste à vous adorer et vous aimer ici-bas, afin qu’au ciel mon bonheur et ma gloire soient de vous adorer et de vous aimer pendant l’éternité.
2. "Cette parole est dure, et qui peut l'écouter?" (Ioan. VI, 61.)
3. "Voici que je vais faire toutes choses nouvelles." (Apoc. XXI, 5.)
4. "J'ai dit au Seigneur: vous êtes mon Dieu." (Ps. XV, 2.)
5. "Que le corps de Notre-Seigneur Jésus-Christ garde votre âme pour la vie éternelle." (Paroles du prêtre au fidèle qu'il communie.)
6. "Et nous avons tous reçu de sa plénitude." (Ioan. I, 16.
7. Ioan. III, 16.
8. "Vos amis sont singulièrement honorés." (Ps. CXXXVIII, 17.)