OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|SUJETS DE MEDITATIONS POUR LE TEMPS ENTRE LE 14 JANVIER ET LA SEPTUAGESIME

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|SUJETS DE MEDITATIONS POUR LE TEMPS ENTRE LE 14 JANVIER ET LA SEPTUAGESIME
  • LUTTE CONTRE DIEU
  • Méditations sur la Perfection Religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 151-154.
  • CO 4
Informations détaillées
  • 1 AUGUSTIN
    1 LACHETE
    1 PERSEVERANCE
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    1 RESISTANCE A LA GRACE
    1 VIE DE SACRIFICE
    1 VOIE UNITIVE
    2 JACOB
    2 JOB, BIBLE
  • 1875
La lettre

Il y a une lutte mauvaise, avec Dieu, c’est celle par laquelle nous voulons en quelque sorte Dieu sous le poids de nos péchés, de nos vices ou de nos faiblesses. Mais il y a une autre lutte dans laquelle c’est Dieu qui nous poursuit de ses instances miséricordieuses et de son amour. Or, il y aurait un crime véritable à lui résister, et c’est sur cette lutte que je veux réfléchir, et j’examinerai les conditions de cette lutte.

I. Sentiment intérieur.

Je rentre en moi et je sens que Dieu me demande quelque chose. Qu’est-ce que c’est? Un effort, un sacrifice, un affranchissement. Enfin, c’est comme l’entrée dans un monde nouveau. Je sens que de nouveaux horizons vont m’apparaître, mais j’ai devant moi des obstacles.

Ces obstacles, que fais-je pour les surmonter? Et pourtant, je sens bien que je ne puis rester où j’en suis, et que, si je n’avance pas, forcément je reculerai.

Où en suis-je?

II. Résistance.

Mon Dieu, est-ce que je résiste? C’est, de ma part, je ne sais quelle disposition; c’est une force d’inertie qui veut, qui ne veut pas. Ah! quelle triste condition! Je résiste à l’aiguillon, et cela m’est dur, très dur. Combien de temps durera cette résistance?

D’autre part, mon Dieu, est-ce que vous ne me résistez pas? Je crie, et vous ne m’écoutez pas. Je me présente à vous, et vous ne me regardez pas. Votre prophète ajoute que vous lui êtes devenu cruel: Mutatus es mihi in crudelem(1). N’êtes-vous pas devenu cruel pour moi depuis que je vous invoque et que vous semblez ne pas vouloir m’exaucer?

Mais s’il est vrai, mon Dieu, que vous me repoussiez en apparence seulement, pour me forcer à me jeter avec plus d’entraînement dans vos bras, me voilà, Seigneur, comme la Chananéenne; je vous poursuivrai de mes cris jusqu’à ce que vous m’ayez accordé ce que je vous demande.

III. Persévérance.

Dans cette situation, ô mon Dieu, vous avez des feintes merveilleuses. Comme Jacob, que votre ange attaqua pendant la nuit, vous m’attaquez, puis vous voulez vous retirer. « Laisse-moi aller », dites-vous, mais Jacob ne vous laissa aller que quand vous l’eûtes béni. De même, mon Dieu, je me soumets à vous, mais je ne vous laisserai aller que quand vous aurez versé vos bénédictions dans mon âme: Non dimittam te donec benedixeris mihi(2). Alors je pourrai vous laisser aller, mais pas avant; car, lorsque vous m’aurez béni, je sais bien que vous resterez avec moi.

IV. Sacrifice.

Si vous me poursuivez, mon Dieu, et si je vous poursuis, c’est que vous attendez quelque chose de mon coeur; vous attendez le sacrifice, et vous voulez que je vous le donne complet, et si je vous poursuis, c’est que je sens bien que vous seul pouvez apaiser les aspirations de mon âme.

Ah! Seigneur n’est-ce pas le cas de dire avec saint Augustin: Da quod iubes et iube quod vis(3). Donnez-moi la grâce de faire ce que vous me commandez, et puis commandez ce qui vous plaira.

V. L’Union.

Après tout, mon Dieu, si vous voulez lutter avec moi, c’est que vous me voulez. Et moi, Seigneur, je vous veux aussi; je vous veux de toutes les puissances de mon âme. Que je vous sois donc uni, et que le terme de cette lutte soit Seigneur, l’union la plus grande de votre créature avec son Créateur, d’une pauvre âme rachetée avec son Rédempteur, et que de ces combats si admirables de votre part et de mes élans vers vous résulte une union et plus intime et plus durable.

Notes et post-scriptum
1. "Vous êtes devenu cruel envers moi." (Iob. XXX, 21.)
2. "Je ne vous laisserai point aller que vous ne m'ayez béni." (Gen. XXXII, 26.)
3. S. Aug. Confess., X, 27.