- T1-389
- 354
- Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.389
- Orig.ms. ACR, AN 49; D'A., T.D. 38, n.49, pp. 185-188.
- 1 AMOUR DU CHRIST
1 BONTE
1 BUDGETS
1 CHOIX
1 CONFESSION SACRAMENTELLE
1 CONTRARIETES
1 EMPLOI DU TEMPS
1 ENERGIE
1 FAMILLE
1 FOI
1 MISSION DES LAICS
1 PAIX
1 PENITENCES
1 PRATIQUE DE LA PAUVRETE
1 REVE
1 SALUT DES AMES
1 SCANDALE
1 SERVICE DE L'EGLISE
1 TIERS-ORDRE FEMININ
1 VERTU D'OBEISSANCE
1 ZELE POUR LE ROYAUME
2 ALEYRAC, BARON D'
2 ALEYRAC, MADAME D'
2 CHAZELLES, MADAME DE
2 JELOWICKI, ALEXANDRE
2 LAPIERRE
2 PENNAUTIER, MADAME PAUL DE
2 SAINT-PREGNON, MADAME DE
2 SIBERT, BARON DE
3 LYON
3 PARIS - A MADEMOISELLE AMELIE DE PELISSIER
- ESCURES Comtesse
- 12 février 1854.
- 12 feb 1854
- Nîmes,
- Mademoiselle
Mademoiselle de Pélissier
13, avenue Marbeuf, près les Champs Elysées
Paris.
Ma chère fille,
J’ai un peu de temps à moi cet après-midi, je vous le consacre bien volontiers. Laissez-moi vous dire l’ennui que me cause l’arrivée de Mme de Chazelles à Paris. Vous allez être longtemps perdue pour nous. Je vous engage, dans tous les cas, à vous placer dans une situation très nette. Ou vous aurez Blanche, ou vous ne l’aurez pas; il faut un oui ou un non très positif, sans quoi il faut vous attendre à de très grands désagréments[1].
La confession générale que vous voulez faire me paraît peu propre à vous calmer. Je vous indiquerai pourtant le P. Jelowicki[2], qui confesse en la chapelle de l’Assomption, rue Saint-Honoré. C’est un très saint homme, que j’aime beaucoup. L’écritoire que vous voulez vous donner me semble bien chère pour une personne qui veut pratiquer la pauvreté. Tâchez de prendre quelque chose qui vous rappelle que vous voulez vivre comme une pauvre. Vous avez bien fait de m’envoyer votre budget; continuez ainsi.
Les affaires de Mme d’Al[eyrac] s’embrouilleront tout à fait ou se débrouilleront selon un parti qu’elle prendra, ou que du moins Mme de Chaz[elles] et Mme de Saint-Prégnon prendront pour elle. M. d’Al[eyrac] consent à lui rendre ses enfants, à condition que, tant qu’ils seront chez elle, Mme de Chaz[elles] et Mme de Saint-Prégnon n’y viendront pas. C’est un prétexte tout comme un autre, mais enfin il faut cette satisfaction à M. d’Al[eyrac]. Mme d’Al[eyrac] ne la peut donner, mais sa mère et sa soeur peuvent déclarer que pour un bien de paix elles s’abstiendront d’aller à Lyon quand Mme d’Al[eyrac] aura ses filles auprès d’elle. Mme de Saint-Prég[non] m’avait d’elle-même offert quelque chose de semblable dans le temps; si elle pouvait me le faire redire ou me l’écrire, je m’en servirais utilement. S’il y a un procès, M. d’Al[eyrac] fait venir un avocat de Paris qui ait à se plaindre de M. de Sibert, et alors il y aura un vrai scandale, Aidez-moi à l’éviter. M. Lapierre a dû écrire à Mme de Saint-Prég[non],, engagez-la à donner une réponse qui facilite un arrangement.
Maintenant, parlons un peu de vous. Ma chère fille n’est pas contente de son père. Elle peut bien avoir raison. Cependant, je voudrais que vous voulussiez remarquer que, de si loin, il m’est très difficile de répondre toujours bien juste à ce qui vous convient. Cependant, je crois pouvoir vous dire ceci: 1° que je prends très volontiers la responsabilité de votre salut, pourvu que vous ayez un peu plus de fermeté dans le caractère et un peu plus de décision; 2° que cette fermeté et cette décision vous viendront avec un peu plus d’esprit de foi et d’obéissance; vous n’êtes pas en révolte, mais vous n’avez pas la force d’avancer là où l’on vous pousse. Mais cette force, si vous vouliez bien, vous pourriez l’avoir. Je vais du reste prier plus particulièrement pour vous ces jours-ci; je dirai la messe à votre intention samedi prochain. Je voudrais bien que votre zèle s’enflammât un peu du côté de Notre-Seigneur et pour l’Eglise; offrez quelquefois vos mortifications pour la conversion des pécheurs. Je ne suis pas surpris que vous soyez entraînée à la rêverie; vous n’avez pas de but, et votre indécision vous empêche de vous dire: [[Voilà ce que je vais faire]]. Il vous faudrait une vie occupée, et la vôtre ne l’est peut-être pas assez. Voulez-vous prendre quelquefois la discipline à une intention que j’ai?
Je regrette que vous ne vous posiez pas un peu plus rondement en chrétienne chez Mme de Saint-Pr[égnon]. Soyez aussi aimable que possible, et tâchez de lui faire tout le bien dont vous êtes capable; faites quelques petites mortifications pendant le temps du carnaval. Etes-vous exacte aux petites pratiques du T[iers]-O[rdre]? Je m’aperçois qu’il est très bon de s’en entourer comme d’un rempart. Adieu, ma chère enfant. Laissez-moi vous dire combien je vous suis profondément attaché. Je ne sais pourquoi je suppose un peu trop que vous devez en être si profondément convaincue, qu’on ne doit pas avoir besoin de vous le redire; cependant rien n’est plus vrai, et, quand je rentre dans mon coeur, je vois bien que je pécherai sur ce chapitre plutôt par excès que par défaut; mais j’aime mieux croire que je ne péche pas du tout et que Dieu veut que votre si délicate nature s’appuie sur une main de père et d’ami pour aller où vous êtes appelée.
Je vous envoie une bénédiction, mon enfant, et je demande à Dieu de vous montrer tout ce que je veux être pour vous. J’espère vous voir dans la première semaine de carême. Adieu, ma fille. Voyez-vous, je n’en finirai pas.
E. D'ALZON.