- PM_XIV_409
- 0+552 a|DLII a
- Périer-Muzet, Lettres, Tome XIV, p. 409.
- Orig.ms. ACR, AD 557; D'A., T.D. 20, pp. 2-3.
- 2 CARBONNEL, MARIE-VINCENT
3 BORDEAUX
3 PARIS - A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
- MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
- Bordeaux, 12 janvier [18]48.
- 12 jan 1848
- Bordeaux
Ma chère enfant,
J’espère arriver à Paris samedi soir. Je pars d’ici après-demain matin, et encore ai-je toute la peine du monde, parce que les places étaient prises à la malle-poste et aux diligences. Si vous avez quelques recommandations à me faire à l’avance, veuillez m’écrire deux mots rue Saint-Dominique, n° 44. Je regrette de n’avoir pu, comme je l’avais espéré, arriver le samedi matin, afin d’avoir avant la prise d’habit de Soeur Marie-Vincent l’explication que vous désirez. Moi aussi, je la désire: elle sera, je crois, très facile de ma part. J’y apporterai tout mon coeur, et, en même temps, la résolution de vous laisser, pour peu que vous le croyiez utile, une liberté dont vos dernières lettres semblent trop montrer le désir, peut-être même le besoin, pour que je ne crusse pas dangereux de vous la refuser, si vous la trouvez nécessaire au développement de votre âme.
Je pense beaucoup à vous tous ces jours-ci. Je finis toujours par conclure à la nécessité: ou de vous rendre votre indépendance, ou, si vous ne la voulez pas, d’exiger de vous le sacrifice de doutes, avec lesquels je ne puis vous faire aucun bien et que je croyais ne pas mériter. Vous voyez, ma chère enfant, que j’entre dans la pensée de votre dernière ou avant-dernière lettre. Je ne crois pas qu’il puisse vous être avantageux de rester dans l’état violent qu’elle indiquait chez vous. Notre-Seigneur n’a guère écouté mes prières, si depuis il ne vous a pas rendu la paix, et, pour ma part, afin de vous la procurer, je suis bien positivement résolu aux plus pénibles sacrifices, s’ils devenaient nécessaires; ils vous prouveraient du moins le désintéressement de mon amitié.
Je ne crois pas qu’en face de pareilles pensées de longues paroles soient nécessaires. La première parole que je vous dirai, quand nous pourrons nous voir seuls, sera pour vous rendre toute votre liberté. Si vous croyez devoir la garder, nos rapports pourront et devront changer, quoique d’avance je sois bien sûr d’être toujours le même pour vous.
Adieu, ma chère fille. Priez beaucoup et que Notre-Seigneur vous inspire ce que vous devez me dire. Je le conjure d’être au milieu de nous, pour que l’un et l’autre nous ne fassions que sa volonté.
E.D’ALZON.
Veuillez dire à Soeur M.-Vincent mon regret de n’avoir pu arriver vingt-quatre ou quarante-huit heures plus tôt, comme je l’avais voulu. Si la jeune personne qui prend l’habit avec elle, avait quelque chose dont il fallût parler dans la petite allocution qui précédera la vêture, vous voudriez bien me l’écrire à l’avance.
E.D'ALZON