- PM_XIV_363
- 0+544 a|DXLIV a
- Périer-Muzet, Lettres, Tome XIV, p. 363.
- Orig.ms. ACR, AD 538; D'A., T.D. 19, pp. 232-234.
- 1 ACTION DE DIEU DANS L'AME
1 ACTION DU CHRIST DANS L'AME
1 AME SUJET DE LA VIE SPIRITUELLE
1 AMITIE
1 CRITIQUES
1 DIRECTION SPIRITUELLE
1 ENERGIE
1 ERREUR
1 EXAMEN DE CONSCIENCE
1 ILLUSIONS
1 IMPRESSION
1 LANGAGE
1 LIBERTE DE CONSCIENCE
1 PATERNITE SPIRITUELLE
1 RECHERCHE INTERIEURE
1 RESISTANCE A LA GRACE
1 SUPERIEURE
1 SYMPTOMES
1 UNION DES COEURS
1 VIE DE PRIERE
1 VOYAGES
2 CARBONNEL, MARIE-VINCENT
2 LACORDAIRE, HENRI
3 LAVAGNAC
3 NIMES
3 PARIS - A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
- MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
- Lavagnac, le 13 septembre 1847.
- 13 sep 1847
- Lavagnac
- *Madame*
*Madame la Supérieure de l'Assomption*
*n° 76, rue de Chaillot*
*Paris.*
Je viens de lire votre lettre du 8 et du 9, ma chère enfant. Quoique je n’aie pas beaucoup de temps, je vais, avant de faire autre chose, vous faire trois observations:
1° Jamais je n’ai eu l’idée de comparer la nature de vos sentiments à ceux de Mlle C[arbonnel], je n’en ai peut-être comparé que l’intensité.
2° Je me suis reproché dans ma dernière lettre celle du 3. Certaines expressions, écrites un peu à la hâte, qui n’étaient pas assez expliquées ont dû amener les observations, de votre part, que je trouve dans votre lettre d’aujourd’hui. A peine la mienne partie et en y réfléchissant, je vis bien que vous pourriez mal saisir ma pensée, et cela par ma faute. Rassurez-vous à cet égard et soyez assez bonne pour me comprendre dans le sens convenable. J’accepte tout ce que vous me dites et j’entre dans votre pensée si bien que je ne pense pas que nous ayons là-dessus besoin de nouveaux éclaircissements.
[3°] Quant à la manière dont vous envisagez le mot arrangements, au sujet de mon voyage à Paris, permettez-moi de vous dire qu’il me semble que vous avez tort d’interpréter ce mot comme vous le faites.
4° Une quatrième observation sera relative à ce que vous me dites au sujet du soin que j’aurais de relever votre âme. Je vous donne pleinement raison, si vous admettez que je devais réussir, mais non pas s’il suffit que j’y ai mis toute la bonne volonté possible. Mais je m’arrête pour le moment, je suis un peu souffrant. Je reviendrai demain sur ce sujet.
Le 14 sept[embre].
Je viens de dire la messe pour vous, et, comme ce que vous me disiez dans votre lettre reçue hier me préoccupait un peu, savez-vous à quelle tentation j’ai été prêt à succomber? C’est que, puisque l’âme qui me préoccupe le plus, de façon que je ne prie presque plus pour moi, tant je prie pour elle, trouve que je ne lui porte pas une assez grande charité, j’étais incapable de m’occuper de la direction des âmes et je devais y renoncer,non seulement pour vous mais pour les autres. Car enfin je fais très bon marché de ce qu’on me reproche, et quand une fois j’ai la conviction d’avoir fait tout ce que je puis, je n’ai plus qu’à tirer la conclusion de mon incapacité, et sur ce point personne n’en aura plus que moi l’évidence. Je sais bien ce que l’on peut répondre, il est vrai, c’est que ce qui est impossible à l’homme est possible à Dieu, et c’est ce qui me soutient. Mais encore, si priant pour vous comme je le fais, je ne réussis pas mieux, que conclure? Peut-être que je ne prie pas bien. Eh, mon Dieu, je n’avais pas besoin de cette preuve nouvelle pour en être convaincu. Ce que je conclus, c’est que je ne suis bon à rien, pas même à ce genre de bien qui m’est le plus cher, puisque, au lieu de vous aider à marcher vers la sainteté, je suis pour vous une pierre d’achoppement, que je vous fais perdre votre énergie morale et la puissance d’action, à l’aide de laquelle vous auriez glorifié Dieu. Car derrière votre âme, ma fille, j’envisage celles dont vous avez la conduite et qui, d’après ce que vous me dites, s’affaiblissent de toute l’énergie qui vous est enlevée.
Du reste, ma chère enfant, pour répondre à tout ce que vous me dites, il faudrait, ce me semble, des volumes d’explications, qui par écrit amèneraient encore des difficultés. Je crois de beaucoup préférable de les renvoyer à notre prochaine réunion. Il est évident qu’il y a eu entre nous beaucoup de malentendus. Ainsi lorsque je me suis moins occupé de vous comme supérieure, je n’ai pas eu d’autre motif que de vous laisser une liberté plus grande et que vous me paraissiez réclamer, à mesure que nous nous entendions moins pour ce qui vous était personnel. Si j’entre dans votre pensée, vous semblez désirer maintenant que je vous donne quelque soutien pour le développement spirituel de votre âme. Il faudra pour cela que vous ayez la bonté de me dire où vous en êtes avec Dieu et avec vos Soeurs, car il y a assez longtemps que vous ne m’en avez rien dit. Je tâcherai d’y répondre aussi bien que possible, quoique je le sente bien, nous aurons bien besoin de nous voir et de parler avant de nous remettre dans un état complet d’intelligence réciproque.
Je ne sais plus si j’irai chez le P. Lacordaire. Je pars après-demain d’ici, mais si pendant les deux jours que je resterai à Nîmes, je continue à souffrir, comme à présent, de mes crampes d’estomac, je crois que je renoncerai à cette course, quoique à mon grand regret. Je vous écrirai de Nîmes ce que je ferai, afin que vous sachiez où m’adresser vos lettres.
Adieu, ma chère fille. Que Notre-Seigneur soit lui-même votre guide, si c’est par sa volonté que je suis dans les ténèbres à votre égard. Je puis vous assurer au moins que je le prierai de toute mon âme, pour qu’il vous aide à proportion du peu de secours qu’il vous donnera par moi. On me dérange.