- DR11_396
- 5647
- DERAEDT, Lettres, vol.11 , p. 396
- Cop. ms. ACR, AP 165, d'après le *Voeu national* du 8 juillet 1876; D'A., T.D.40, n.9, pp.307-309.
- 1 ATHEISME
1 GOUVERNEMENT
1 JEUNESSE
1 POPULATION
1 PRETRE
2 ALZON, EMMANUEL D'
2 BESSON, LOUIS
2 CAZAUX, ALEXANDRE
2 JOUBIN, L.
2 SARCEY, FRANCISQUE
2 WADDINGTON, WILLIAM-HENRY
3 NIMES
3 SAINT-CESAIRE - A MONSIEUR LE REDACTEUR DE L'UNIVERS
- PRESSE_UNIVERS
- Nîmes, 3 juillet [1876].
- 3 jul 1876
- Nîmes
Monsieur le rédacteur,
Permettez-moi de vous donner une nouvelle preuve de la bonne foi du XIXe siècle M. Sarcey, dans un article que l’on vient de me montrer et qu’il juge à propos d’intituler Les Compatriotes de l’abbé d’Alzon, affirme qu’il y a plus d’un an que j’ai demandé la révocation du proviseur du lycée de Nîmes(1).
Ce fait est complètement faux et je donne le démenti le plus catégorique à M. Sarcey. Comment moi, anti-universitaire, eussé-je pu demander la révocation d’un homme, qui, comme repoussoir, fait si bien les affaires des établissements catholiques? Je désire de toute mon âme que M. le proviseur reste, et reste très longtemps à la tête de notre lycée, et cela dans un intérêt tout contraire à celui de l’université officielle.
Mais M. Sarcey vise plus haut, il vise le refus que vient de faire le conseil municipal de Nîmes d’adhérer à la proposition du protestant M. Waddington de créer un petit collège protestant à Nîmes. Pour comprendre les paroles du ministre que je vais citer, il faut savoir que la partie Est des environs de Nîmes est toute catholique, et la partie Ouest presque entièrement protestante. M. Waddington demandait que le petit collège fût placé dans un village de la partie Ouest. « La population des villages voisins, riche et en grande partie protestante, est très favorable à l’enseignement universitaire et forme, à elle seule et depuis longtemps, plus de la moitié de la population scolaire du lycée. La création d’un petit collège à Saint-Césaire ne ferait, pour ainsi dire, que rapprocher l’établissement de sa clientèle ».
Laissons le style franco-anglais de M. le ministre et tirons de ses paroles quelques précieuses conclusions.
1° Le conseil municipal de Nîmes, entièrement composé de catholiques parce que les protestants ont, aux dernières élections, refusé de s’entendre avec la majorité, pouvait-il favoriser un petit collège destiné à multiplier les protestants au lycée qui compte à peine, non pas la moitié, mais le tiers, sinon le quart de catholiques?
2° Mais en prenant la question de plus haut, M. le ministre reconnaît que la population protestante est très favorable à l’enseignement universitaire. N’est-ce pas la raison pour laquelle nos catholiques aiment si peu cette éducation? Car, si le lycée est surtout peuplé de protestants, il ne faut pas oublier que la population du département est aux trois quarts catholique.
3° Un petit collège à Saint-Césaire favoriserait exclusivement, de son propre aveu, les coreligionnaires de M. Waddington. Mais pourquoi la population des villages voisins, riche et en grande partie protestante, ne fait-elle pas ce que font ces affreux catholiques: un établissement privé, sans demander l’argent d’un conseil municipal entièrement catholique?
M. Sarcey conclut de quelques paroles exprimant le refus du conseil municipal: « Voilà le grand mot lâché; l’enseignement libre, c’est l’abbé d’Alzon ». Non, l’enseignement libre, ce n’est pas l’abbé d’Alzon. Car, à côté de lui, il y a d’autres établissements libres dans Nîmes, et j’annonce à M. Sarcey que Monseigneur l’évêque va en former un nouveau dans son propre évêché, un externat qui risque fort de fournir aux parents l’occasion de montrer leur peu de sympathie pour l’enseignement du lycée.
Seulement, au lieu de voir les populations riches et protestantes réclamer la munificence du gouvernement et des conseils municipaux, les catholiques verront leurs prêtres accepter de durs sacrifices pour conserver la foi des jeunes générations dans la maison épiscopale, où l’enseignement sera donné à un prix si réduit qu’il sera presque gratuit. Ah! ces évêques qui croient en Dieu et à l’existence de l’âme, quel mal ne font-ils pas à l’université, qui, elle, a le droit de ne rien croire!
Votre bien dévoué
E.D'ALZON|des Augustins de l'Assomption.