DERAEDT, Lettres, vol.11 , p. 373

29 apr 1876 Nîmes PICARD François aa

L’indult pour les ordinations – Cristol – A propos de diverses religieuses – Charette – M. Orengo – Une suggestion de cadeau.

Informations générales
  • DR11_373
  • 5619
  • DERAEDT, Lettres, vol.11 , p. 373
  • Orig.ms. ACR, AF 141; D'A., T.D. 26, n. 528, pp. 117-118.
Informations détaillées
  • 1 ADMISSION AUX VOEUX
    1 ARMEE
    1 BONTE
    1 CREANCES A PAYER
    1 CRITIQUES
    1 CURE
    1 DECRET "REGULARI DISCIPLINAE" AUX ASSOMPTIONNISTES
    1 GOUVERNEMENT
    1 JURIDICTION EPISCOPALE
    1 LIVRES
    1 LUTTE CONTRE LE MONDE
    1 MALADIES
    1 NOVICE
    1 ORDINATIONS
    1 ORDRES MINEURS
    1 ORDRES SACRES
    1 PROFESSION PERPETUELLE
    1 RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 ROYALISTES
    1 SERVICE DE L'EGLISE
    1 SEVERITE
    1 TONSURE
    1 VETURE RELIGIEUSE
    2 BAILLY, VINCENT DE PAUL
    2 BESSON, LOUIS
    2 CHARETTE, ATHANASE DE
    2 COURCY, MARIE-GABRIELLE DE
    2 CRISTOL, PAUL-JOSEPH
    2 DUMAZER, ALEXIS
    2 HUMMEL, MARIE-PAUL
    2 LAVIGNE, PERE
    2 MARTINUCCI, PIO
    2 MILLERET, MARIE-EUGENIE
    2 MUN, ALBERT DE
    2 ORENGO, GIUSEPPE
    2 PERIER-MUZET, JEAN-PAUL
    2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI
    2 ROUSSEAUX, MARIE DU SACRE-COEUR
    2 SOLA, JEAN-PIERRE
    3 NICE
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 ROME
    3 ROME, SEMINAIRE FRANCAIS
  • AU PERE FRANCOIS PICARD
  • PICARD François aa
  • Nîmes, le 29 avril 1876.
  • 29 apr 1876
  • Nîmes
La lettre

Cher ami,

Vous devez être arrivé et je vous en félicite. Mais voici une grosse affaire pour moi. Je croyais que l’indult pour les ordinations n’exigeait la profession que pour les ordres sacrés. En relisant attentivement, il y est question de tous les ordres. Or, voici la question à poser.

1° La tonsure est-elle comprise parmi les ordres? et, si elle compte comme ordre, je demande l’absolution pour avoir bona fide présenté huit jeunes gens à la tonsure, quand ils n’étaient que novices(1).

2° La tonsure étant le signe du renoncement au siècle, peut-on solliciter la permission de la faire conférer aux novices? Remarquez que si j’avais demandé à l’évêque de Nîmes, qui a donné cette tonsure à Paris de licentia arbitrii episcopi, incontestablement il eût fait pour moi ce qu’a toujours fait Mgr Plantier, il eût considéré ces tonsurés comme siens.

3° Il est dit qu’ils doivent être litteris commendatitiis muniti; mais quand ils les ont demandées, la lettre Regulari disciplinae(2) dit que si les évêques ne les envoient pas, les examinateurs peuvent aller en avant. Pour les ordinations, est-il nécessaire de les avoir, si ayant été demandées, on n’a pas répondu?

Veuillez dire à Madame la Supérieure que je lui écrirai demain. L’évêque commence à comprendre que j’avais bien jugé le Cristol. Il est parti pour sa tournée, malade d’une scène qu’il avait eue avec le secrétaire général. Ainsi soit-il.

(Confidentiel) -Si la supérieure, à son tour, peut être bonne pour Soeur Marie-Paul, elle fera bien; celle-ci s’exaspère d’une sévérité qu’elle dit injuste. J’espère lui faire du bien et je pense qu’avec un peu de bonté on ferait plus qu’avec une sévérité aujourd’hui inutile. Soeur M. du Sacré-Coeur exerce ici une influence vipérine contre la supérieure g[énéra]le et contre moi; mais elle poursuit du même coup Soeur M.-Paul et la Mère Marie-Gabrielle, faisant dire aux gens ce qu’ils n’ont pas dit. Usez de tout cela avec prudence et ne parlez qu’opportunément.

La confidence cesse. Eh bien, Nîmes est toujours à sa place. Il paraît qu’au besoin Charette aurait ici quelques compagnies de volontaires; moi, je ne m’y fie pas trop(3). Savez-vous qu’à Nice le gouvernement payerait les dettes du P. Lavigne, prendrait l’église à son compte et demanderait M. Orengo pour curé, lequel nous demanderait pour auxiliaires. Il importerait que vous pussiez passer par Nice et vérifier la chose. Du reste, on m’assure que l’évêque est au plus mal(4). Toutefois, P. Alexis, dont je reçois une lettre, ne m’en dit rien.

Mes tendresses au séminaire français. En partant pour Rome, la supérieure m’a demandé ce que je voulais qu’elle me rapporte. Je ne pensais à rien. Si elle vous en parle, indiquez-lui les 5 volumes de Martinucci(5) sur les cérémonies, et, si elle le trouve trop cher, portez-le. Je vous le paierai, au retour.

Sur ce, cinquante mille bonnes choses. On est on ne peut plus vôtre.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Réponse d'un professeur de droit canon interrogé par le P. Picard: "Tonsura est dispositio ad Ordines, sed non est Ordo" (Picard, 2 mai).
2. Décret du 25 janvier 1848 sur l'admission des novices à l'habit et à la profession.
3. Ancien aumônier de zouaves, Vincent de Paul Bailly voit de temps en temps le général de Charette (v. *Lettre* 5593, n.1). Au début de son séjour à Paris, le P. d'Alzon a eu l'occasion de le rencontrer lui aussi, et le 5 avril, après avoir "beaucoup réfléchi à la conversation que nous avons eue", le général lui a soumis par écrit quelques observations, regrettant qu'"une ancienne blessure, qui, je le crains, va se rouvrir" ne lui ait pas permis d'apporter lui-même cette longue lettre. C'est en effet une lettre de huit pages.
Elle répond aux questions: "Le régiment sera-t-il appelé à jouer un rôle? Quel sera ce rôle? Faut-il s'y préparer, le cas échéant?" La mission de ceux qui ont voulu faire de lui leur chef, le général la définit comme suit : "Verser son sang et mourir, s'il le faut, pour la défense de l'idée religieuse et de ses conséquences sociales et politiques". Il nous apprend aussi que le P. d'Alzon lui a proposé de mettre à sa disposition son influence pour faire des adeptes qui viendraient, le cas échéant, se ranger autour de son drapeau. Citons maintenant un extrait de la lettre du général.
"De grands malheurs peuvent arriver, écrit-il, et, je le répète, nous ne pouvons les désirer: une guerre avec la Prusse, la Commune, l'armée désorganisée.
Deux cas peuvent se présenter; -ou le gouvernement nous appelle et, dans ce cas, la question est simple; -ou bien encore je crois de mon devoir de lever mon drapeau, et alors il n'y a que ceux qui n'ont pris aucun engagement qui aient le droit de venir se ranger autour de lui.
De deux choses l'une; ou le petit groupe servira de point de ralliement, et tous les honnêtes gens viendront se grouper autour pour défendre les intérêts religieux et sociaux. -Ou bien je peux me tromper et cette levée de boucliers, faite trop tôt, n'aboutit pas. -Cette tentative faite au nom des idées religieuses ne compromet ni le pays ni personne autre que nous, et il n'y a à être sacrifiées que des individualités qui y sont préparées, étant accepté[es] depuis longtemps les conséquences de leur position."
Il semble que, pendant son séjour à Paris en avril 1876, Le P. d'Alzon eut d'autres occasions encore de rencontrer le général. Ainsi, invité à déjeuner par le P. d'Alzon pour le 22 avril, Albert de Mun lui écrit le 21 : "Le général de Charette me prie de vous demander si vous lui permettriez de venir déjeuner chez vous demain au lieu de dimanche" et il évoque "le plaisir que nous aurions de nous rencontrer à votre table".
4. Mgr Jean Sola mourut en 1881.
5. Pio Martinucci est l'auteur d'un *Manuale Decretorum Sacrae Rituum Congregationis*, Rome, 1883 et d'un *Manuale Sacrarum Caeremoniarum* en 8 vol., Rome 1869. [note ajoutée le 5 août 1999, d'après des renseignements fournis par J.P. Périer-Muzet].