DERAEDT, Lettres, vol.4 , p. 294

17 may 1863 Paris BRUNONI Mgr

Ce qu’il a obtenu du Comité des Ecoles d’Orient et ce qu’il en espère. – Il a parlé de son emprunt et, s’il ne trouve rien, il pense qu’il pourra lui-même, par la vente d’une terre, lui fournir la plus grande partie de ce qu’il désire. – M. Veuillot lui a promis de l’accompagner l’an prochain à Constantinople et de faire un livre sur la question d’Orient. – Devra-t-il prêcher le carême entier ou se réserver du temps pour s’occuper de la Bulgarie? – Si les Polonais renoncent à Andrinople, il pourra y envoyer deux religieux en octobre. – Par où devons-nous commencer: Philippopoli ou Andrinople? – Si c’est Andrinople, il pourrait sans doute y établir des Soeurs. – Un chapitre à Chalcédoine. – Son rêve serait de le voir patriarche de Constantinople, et Don Andrea archevêque de Chalcédoine.

Informations générales
  • DR04_294
  • 2000
  • DERAEDT, Lettres, vol.4 , p. 294
  • Orig.ms. ACR, CV 44.
Informations détaillées
  • 1 ARCHEVEQUE
    1 BULGARES
    1 CAPITAUX EMPRUNTES
    1 CHANOINES
    1 ECOLES
    1 GRECS
    1 LITURGIE ROMAINE
    1 MISSION DE BULGARIE
    1 OEUVRES D'ORIENT
    1 PREDICATION DE RETRAITES
    1 PREDICATIONS DE CAREME
    1 SEMINAIRES
    1 SUBVENTIONS
    2 ABRIC, PHILIPPE
    2 BARNABO, ALESSANDRO
    2 BRIEY, ALBERT DE
    2 CALOMATI, ANDREA
    2 DAMAS, AMEDEE DE
    2 DROUYN DE LHUYS, EDOUARD
    2 GALABERT, VICTORIN
    2 LEON I LE GRAND, SAINT
    2 ROCHE
    2 SABRAN, LOUIS PERE
    2 SAUGRAIN, HIPPOLYTE
    2 SOUBIRANNE, PIERRE
    2 VEUILLOT, LOUIS
    3 ANDRINOPLE
    3 ANGLETERRE
    3 BULGARIE
    3 BUYUKDERE
    3 CONSTANTINOPLE
    3 KADI-KOY
    3 LIBAN
    3 ORIENT
    3 PHILIPPOPOLI
    3 ROME
    3 SYRIE
  • A MONSEIGNEUR BRUNONI, VICAIRE APOSTOLIQUE PATRIARCAL DE CONSTANTINOPLE
  • BRUNONI Mgr
  • Paris, 17 mai 1863.
  • 17 may 1863
  • Paris
La lettre

Monseigneur,

Je suis arrivé ici avant-hier et j’en repars ce soir, ce qui ne me permet pas de voir le ministre des Affaires étrangères. Mais je crois avoir fait quelque chose pour Constantinople.

1° Je crois avoir convaincu les membres du Comité des Ecoles d’Orient qu’il y avait à faire plus à Constantinople qu’en Syrie.

2° Entre ces messieurs et moi, il a été décidé que j’allais faire une tournée dans les diocèses(1) et que tout ce que je pourrais recueillir serait pour les Grecs, les Bulgares et l’Eglise latine de Constantinople, pourvu que je fisse affecter les dons à cette destination.

3° Que sur les fonds généraux, une portion beaucoup plus considérable serait désormais affectée à Constantinople et à toutes les oeuvres qui s’y rattachent.

4° Dès lors, vous pouvez être assuré que l’on fera quelque chose pour l’église et l’école de Bergeik-Déré, pour les Géorgiens et pour l’église de Chalcédoine.

Si Votre Grandeur formulait elle-même au plus tôt une demande détaillée et tout ce qu’Elle désire, et si Elle me la faisait parvenir, je crois que nous pourrions espérer peu à peu toucher des sommes importantes. Ainsi je ne doute pas que si vous demandiez des bourses pour faire élever quelques Bulgares en France, on ne vous les accordât; comme aussi je suis assuré que vous aurez toutes les bourses nécessaires pour le futur séminaire. Les Jésuites obtiennent pour le Liban environ 100 à 150.000 frs par an; je ne doute pas que nous n’atteignions cette somme pour Constantinople. Je ferais, si vous le voulez, les demandes en votre nom quand vous aurez eu la bonté de m’envoyer la note détaillée de toutes les allocations que vous désirez recevoir, parce qu’il me paraît indispensable que tout passe par vos mains et qu’à Constantinople vous fassiez vous-même les distributions. Ce ne sera pas cette première année sans doute que vous toucherez toute la somme que j’espère, mais je suis convaincu que nous ferons la boule de neige et que nous arriverons à de précieux résultats.

J’ai parlé de votre emprunt. Je ne puis encore rien affirmer; mais j’ai des espérances, et, si je ne trouve rien, je pense que peut-être je pourrai vous fournir la plus grande partie de ce que vous désirez. J’ai mis en vente(2) une terre de quatre à cinq cents mille francs. Il s’agit à présent en la vendant de faire une bonne affaire.

J’ai vu hier M. Veuillot; il m’a promis de m’accompagner l’an prochain à Constantinople et de faire un livre sur la question d’Orient. Ceci n’est qu’un projet, mais qui, réalisé, aiderait bien à augmenter nos ressources. Quant à moi, Monseigneur, je prierai Votre Grandeur d’examiner ce qui serait préférable: que je prêche le carême(3) tout entier ou seulement une retraite, afin de me réserver plus de temps pour m’occuper de la Bulgarie. Si je puis arriver plus tard, je pourrai faire un voyage à Andrinople.

Le Père Galabert m’écrit que peut-être les Pères Polonais renonceront à cette ville; dans ce cas, je tiens deux religieux prêts pour le mois d’octobre, tous deux sachant faire l’école. Votre Grandeur sait que, dès que cette école sera ouverte et que vous aurez attesté que les choses y vont bien, on mettra, pour la développer, 12.000 frs qui sont en caisse aux Ecoles d’Orient, avec cette destination. A votre disposition, il y a encore six mille francs, dont-on ne parle pas, mais que vous obtiendrez bientôt si vous faisiez une demande soit pour l’école de Sion, soit pour les Géorgiens, soit pour Bergeik-Déré(4).

Pour ce qui me concerne, je désire savoir d’une manière définitive par où nous devons commencer: Andrinople ou Philippopoli. Si c’est à Andrinople, je pourrais probablement y établir bientôt des Soeurs; mais, bien entendu, après vous avoir exposé un petit plan qui permettrait d’établir les Soeurs indigènes dont vous m’avez parlé quelquefois.

Je ne sais si j’ai dit à Votre Grandeur que, causant avec le cardinal Barnabo, il me dit: Puisque vous parlez de l’archevêché de Chalcédoine, pourquoi ne fonderiez-vous pas le Chapitre dont les chanoines seraient les professeurs de votre séminaire? Ce serait comme en Angleterre, où il y a quelque chose de semblable.

Je lui répondis: Eminence, à faire tant que de fonder un Chapitre dans l’Orient, j’aimerais autant le fonder à Constantinople où il faut de toute nécessité que l’on s’occupe d’avoir bientôt un patriarcat latin. Il ne repoussa pas la proposition.

Votre Grandeur pense-t-elle que 300.000 frs placés sur les propriétés de l’archevêché à six pour cent et donnant 18.000 frs, on peut avoir 8 chanoines à 2.000 frs, plus 2.000 frs pour certains frais du choeur? Si ces chanoines étaient des religieux, les choses iraient mieux encore pour l’économie. Peut-être pourrait-on commencer avec six chanoines seulement. Ceci n’est qu’une idée: les chanoines religieux seraient en même temps professeurs, mais il faudrait alors mettre le séminaire à Constantinople même; quant aux bourses des jeunes gens, je ne crois pas qu’il y eût à s’en occuper: les Ecoles d’Orient y pourvoiraient. Peut-être, dans le cas où cette idée aurait chance de réussir, M. l’abbé de Briey(5) pourrait-il nous aider de sa fortune.

Mon rêve serait de vous voir patriarche de C[onstantino]p[le] et Don Andréa archevêque de Chalcédoine, à moins que, pour donner satisfaction aux Grecs, on ne leur donnât l’église que vous avez bâtie(6); car j’ai trouvé à Rome bien de l’opposition à l’érection de Chalcédoine en archevêché.

Je suis avec respect, Monseigneur, votre très humble et obéissant serviteur.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Dans une longue et très intéressante lettre du 17 mai, l'abbé Soubiranne transmet au P. d'Alzon "nos conclusions de ce matin". Après une série de dispositions concernant les subventions, leur mode d'attribution, la comptabilisation à l'oeuvre des dons reçus par le P. d'Alzon, etc., le directeur des *Ecoles d'Orient* prie le P. d'Alzon de prêcher au nom de l'oeuvre et d'organiser des comités d'hommes ou de dames partout où il le pourra. Il énumère les villes où il serait désirable qu'il parlât de l'oeuvre: Moulins, Poitiers, Montauban, Carcassonne, Toulouse, Marseille, Toulon, Nice, Aix, Avignon, Valence, Lyon, Autun, Châlons, Dijon puis, en allant en Belgique (car le P. d'Alzon envisage en ce moment d'assister au congrès des catholiques belges qui doit se tenir à Malines en août), Reims, Arras. "En Belgique, écrit-il, pendant que vous serez le *Dux verbi*, je m'occuperai à organiser des comités de l'Oeuvre et à faire la quête", et il ajoute: "Après la Belgique, pourriez-vous pousser une pointe en Hollande? Je pense beaucoup à l'Espagne mais je pense qu'il faudra la remettre à l'année prochaine". Le P. d'Alzon a du pain sur la planche...
2. Au cours du mois de juin, le P. d'Alzon chargea de cette vente Louis Sabran et son beau-père M. Roche, "Ventes et achats à la commission, Nîmes-Lyon". Ces messieurs avaient consenti une avance. Des tractations eurent lieu avec divers amateurs, mais le contrat fut rompu par consentement mutuel vers la mi-octobre, et le P. d'Alzon dut faire son deuil de l'avance (Correspondance du P. Saugrain et lettres de L. Sabran à Ph. Abric, passim).
3. Une lettre de Mgr Brunoni au P. de Damas datée du 20 mai remercie ce dernier de sa proposition de prêcher le carême de 1864. Une espèce d'engagement a été pris avec le P. d'Alzon, lui dit-il, mais rien n'est fixé.
4. Voir *Lettres* 1992 et n. 2, et 1994.
5. Le ms a *de Brie*.
6. Et où le P. d'Alzon dit la première messe sur l'autel de saint Léon le 15 avril, veille de son départ de Constantinople (Journal du P. Galabert).