DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.146

6 sep 1859 Lamalou MALBOSC_EUGENIE ra

Mme Sainte-Hélène. – Il lui faut acquérir l’expérience et la volonté requises de la part d’une supérieure: ne pas toujours céder à Soeur M.-Augustine et ne pas fatiguer la Mère générale d’une foule de détails. – Le devoir d’hospitalité. – Il aime beaucoup l’abbé de Cabrières, mais ne peut le forcer à rester. – Il est heureux de la savoir en bons termes avec le P. Galabert. – Un charmant paysage. – Volonté, courage et travail.

Informations générales
  • DR03_146
  • 1296
  • DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.146
  • Orig.ms. AC R.A.; D'A., T.D. 35, n. 9, pp. 53-55.
Informations détaillées
  • 1 ENERGIE
    1 SUPERIEURE
    2 BEVIER, MARIE-AUGUSTINE
    2 CABRIERES, ANATOLE DE
    2 CHALVET, SAINTE-HELENE SOEUR
    2 COMBIE, JULIETTE
    2 GALABERT, VICTORIN
    2 MALBOSC, PAULIN DE
    2 PICARD, FRANCOIS
    2 REVOIL, HENRI-ANTOINE
    3 LAMALOU-LES-BAINS
  • A Soeur Françoise-Eugénie de Malbosc
  • MALBOSC_EUGENIE ra
  • Lamalou, 6 sept[embre 18]59.
  • 6 sep 1859
  • Lamalou
La lettre

Bien chère et bien aimable fille,

Il me semble que Mme Sainte-Hélène serait bien assez, et encore peut-être ferez-vous bien de lui en faire faire la politesse par Juliette. Il est possible qu’elle n’accepte pas(1). En lui faisant demander si cela lui sera agréable, elle viendra ou ne viendra pas selon qu’elle le voudra, et vous aurez été aimable pour elle.

Ah! vous vous trouvez en périlleuse situation! Mais savez-vous bien qu’il vous faut acquérir et de l’expérience et de la volonté! Vous avez un peu tort, chère fille, de céder toujours à Soeur M.-Aug[ustine]. Il faut avoir votre volonté. Je ne comprends pas de quels treillages vous voulez parler, à moins que ce ne soient ceux dont nous étions convenus. Dans ce cas, pourquoi aller fatiguer votre pauvre Mère générale d’une foule de détails? Prenez donc quelque chose sur vous, comme il convient à une supérieure. Et si vous êtes de l’avis de M. Revoil, tenez donc pour ce que dit M. Revoil(2).

Je suis tout heureux de la joie que vous a causée la visite de Monsieur votre frère(3), et je vous engage à le faire dîner toutes les fois qu’il passera par Nîmes. Il y a une certaine hospitalité, qui est et une nécessité, et une convenance, et une vertu. Je me sens très bien pour le bon abbé de C[abrières], mais il ne m’a pas donné signe de vie depuis longtemps. Je l’aime beaucoup, mais comme c’est lui qui veut s’en aller, je dis un peu de lui, comme saint Paul du mari païen: Si discedit, discedat. Je suis tout à fait de votre avis, il est très bon de s’aimer, seulement il ne faut pas forcer les gens plus qu’ils ne le veulent.

Vous voilà donc en bons termes avec le P. Galabert(4). C’est parfait. Je suis sûr que vous ferez du bien à ce pauvre homme, qui aime le bon Dieu de tout son coeur, mais peut-être pas avec toutes les aimables et poétiques délicatesses de ma chère fille. Savez-vous que je pense souvent à vous? Figurez-vous que j’ai là, en face de ma petite fenêtre, à travers un tilleul un peu desséché, au bout d’un vallon encore tout frais un joli village, admirablement posé sur la croupe d’une colline et qui s’encadre entre deux branches agitées par le vent, de sorte que j’en vois successivement les diverses maisons rien qu’en levant la tête. Je me dis quelquefois: si ma fille eût été bergère, elle eût aimé, à coup sûr, une maison blanche, bien proprette et qui se détache d’un bouquet d’oliviers, (l’olivier est le symbole de la paix). Enfin, je me figure que vous êtes là, pour vous avoir plus près de moi, et, à travers mon tilleul, je vous dis: « Bonjour, ma fille, la paix soit avec vous! »

Vous êtes une petite lâche de vouloir mourir. Il faut se tenir prêt à partir ou à rester, selon qu’il plaira à Notre-Seigneur. Si vous croyez que je vous admire pour votre amour du repos, vous vous trompez. C’est de la pure paresse. Au travail, s’il vous plaît, tant qu’il plaira à Dieu de vous en donner! Vous aurez l’éternité pour vous reposer. Mille tendres choses à vos filles. J’attendais, depuis deux ou trois jours, une lettre de Soeur M.-Aug[ustine].

Adieu, ma fille. Volonté, courage et travail. Je ne parle pas de tout le charme que vous saurez y mettre.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Mme Sainte-Hélène, supérieure des Dames de Saint-Maur. Il s'agit ici d'une invitation à la cérémonie de la bénédiction de la chapelle du nouveau couvent des Religieuses de l'Assomption, fixée au 25 septembre.
2. Architecte du couvent des Religieuses de l'Assomption.
3. Paulin de Malbosc.
4. Le P. Galabert assurait depuis peu "jusqu'à nouvel ordre" la fonction d'aumônier des Religieuses de l'Assomption à Nîmes (Galabert à Picard, 1er septembre).