Vous avouerai-je en toute simplicité que le meilleur moment pour moi est surtout le soir, au moment de m’endormir. Il ne faut pas beaucoup d’efforts pour se laisser aller à penser à ce bon Maître, dont on tient l’image entre les mains. On lui dit qu’on l’aime; on lui demande pardon de ses sottises; on est tout à coup frappé de ce pardon qui tomba du haut de la croix; comme un remords, on pense au mal que le péché lui a fait, au temps que l’on a perdu, aux grâces que l’on a reçues; on le remercie de ses bienfaits; on lui fait des promesses enflammées; on rougit d’être dans un bon lit, quand il est mort, lui, sur un gibet; on s’excite à l’aimer, à réparer le temps perdu. On adore Dieu le Père en lui présentant son Fils; on invoque le Saint-Esprit qu’il nous a envoyé; on prie pour l’Eglise qui naquit sur le Calvaire; on rougit d’être si mauvais chrétien; puis on prend courage dans la pensée de l’amour et de la puissance de Dieu, et, si le sommeil n’est pas venu, on trouve le temps court en pareille compagnie.
Lettre aux Adoratrices du Saint-Sacrement (Lettres, t. II, p. 268).
Le Père d’Alzon parle d’expérience, avec ce mélange admirable de simplicité et d’humilité dans une forme d’abandon de foi et un esprit d’enfance spirituelle. Au milieu des épreuves, les plus cuisantes pour son amour-propre, il savait se maintenir dans cette atmosphère surnaturelle propre aux âmes de foi. L’intelligence du mystère de la croix l’aida non seulement à vivre personnellement les épreuves de sa santé et de la crise du collège, mais à soutenir l’espérance des malades qui l’entouraient et à fortifier le cœur des nombreuses personnes qui s’adressaient à sa direction.