L’impression que j’ai eue hier devant la tombe ouverte où l’on descendait le cercueil de notre pauvre Frère (1), pour l’y laisser jusqu’au jour de la résurrection dernière, cette impression, dis-je, de la solennité de la vie et de la mort, ne s’effacera pas de longtemps. Il y a huit jours à peine, ce religieux enseignait, et il était tout entier à son devoir. N’ai-je pas assez surveillé ses fatigues? Aurais-je dû l’arrêter plus tôt? Je ne sais; toujours est-il que c’est une responsabilité affreuse. Si l’on ne ménage pas assez les santés, on perd les religieux; si on les ménage trop, on fait un régiment de gens à dorloter. C’est très embarrassant. Ceci dit pour les supérieurs, il n’en demeure pas moins que vous, religieuses, vous devez faire bon marché de votre personne, et si à un certain point de vue cette question pèse d’un poids terrible sur les personnes chargées de vous commander, il est certain que le meilleur parti, le seul à prendre par vous, c’est de vous donner généreusement, courageusement, sans arrière-pensée.
Conférence aux Religieuses de l’Assomption (1870), d’après Ecrits Spirituels, p. 681-682.
(1) Il s’agit du décès du Frère Edouard Patt, emporté par une hémorragiele 28 novembre 1870, à Nîmes, inhumé le lendemain.