Jetez les yeux autour de vous: ne remarquez-vous pas que les abîmes deviennent plus profonds, que les ruines s’amoncellent, que les catastrophes se préparent! Au milieu de tous ces bouleversements, l’Eglise, stable sur son rocher, voit le vieux monde s’engloutir, comme des rives d’Hippone saint Augustin contemplait la Rome des Césars submergée par les flots pressés des barbares. Le livre de la Cité de Dieu est pour nous comme une seconde révélation, et plus nous l’étudions, plus par analogie nous pouvons y trouver le secret de l’avenir. Que de tristesses, que de découragements ne sortaient pas de ces immenses décombres faites par l’épée et la torche d’un Attila, d’un Genséric? Pourtant c’était Dieu balayant une société pourrie pour en préparer une nouvelle. Les évêques des Gaules surtout ne s’y méprirent point; ayons l’intelligence de nos Pères. Eux saluaient et transformaient la barbarie féodale; pour nous, saluons et transformons la barbarie démocratique. Il y avait sans doute chez nos vieux pontifes gallo-romains quelques regrets de grandeurs évanouies; ils n’en formèrent pas moins la France, ainsi que les abeilles une ruche. Faisons de même: sans regrets trop inutiles du passé, sans espérances trop décevantes, poursuivons notre œuvre telle que Dieu nous la propose.
Instruction de 1868, d’après Ecrits Spirituels, p. 142-143.
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