Maintenant, mon cher ami, comprenez-vous comment j’ai besoin de votre amitié, dans toute la force du mot? Il y a dans votre éducation et dans la mienne ce que j’appellerai une couche d’idées instinctives qui font que, simple chrétien, vous comprenez de sentiment ce que je voudrais faire, bien mieux que d’autres avec tous les raisonnements de la terre. Vous comprenez aussi pourquoi une série d’œuvres bonnes a pu être accomplie par moi avec dégoût, et pourquoi l’entreprise à laquelle je me dévoue peut absorber, pour ma vie, mon être tout entier. Je pourrais, moi aussi, discuter une à une les œuvres que j’ai entreprises, et peut-être pourrais-je me justifier. Mais j’aime mieux admettre un fait vrai, c’est que toujours je ne m’y suis pas porté avec le sentiment d’intérêt que j’aurais dû. Mais pourquoi ce sentiment m’a-t-il manqué, sinon parce que j’étais angarié et non attiré En résumé, qu’on le veuille ou non, j’essayerai. Je réussirai, si Dieu le veut; j’échouerai, si Dieu le veut. Peu m’importe! L’idée est dans ma tête et dans mon cœur; il faut que je la produise, malgré tous les obstacles
humains qui ne m’inspirent aucune crainte réelle.
Lettre à Eugène Germer-Durand (Lettres, t. B, p. 254, 255).
(1) Eugène Germer-Durand (1812-1880), professeur agrégé de l’Université, passé au collège de l’Assomption, marié et père de famille, fut plus qu’un collaborateur de la première heure pour le P. d’Alzon. Confident et ami, membre du Tiers-Ordre, il s’engagea avec foi dans toutes les grandes intuitions et entreprises de l’Assomption.