- Aux Oblates de l'Assomption
- Retraite prêchée par le R. Père d'Alzon - 18 septembre 1875
Troisième instruction - CM 379, pp. 6-7.
- 1 AMOUR-PROPRE
1 BAVARDAGES
1 COMPASSION DE LA SAINTE VIERGE
1 CONVERSION SPIRITUELLE
1 CORRUPTION
1 CRITIQUES
1 DEVOTION A JESUS CRUCIFIE
1 EGOISME
1 EMPLOI DU TEMPS
1 EPOUSES DU CHRIST
1 IMITATION DE JESUS CHRIST
1 INCONSTANCE
1 LACHETE
1 MEDISANCE
1 MENSONGE
1 OBLATES
1 PURGATOIRE
1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
1 TRAVAIL
1 VANITE
1 VERTU DE PAUVRETE
2 ADAM
2 CHATEAUBRIAND, FRANCOIS-RENE DE
2 JOSEPH, SAINT
2 PENELOPE - Oblates de l'Assomption
- Oblates
- du 18 au 25 septembre 1875
- SEP 1875
Mes chères filles,
Nous prendrons aujourd’hui pour texte ces paroles du Saint-Esprit: Si quelqu’un, ayant mis la main à la charrue, regarde en arrière, il n’est pas digne de moi. N’est-ce pas ce qui vous est arrivé, n’avez-vous pas jugé que vous étiez trop sévères pour vous-même, que vous avez pris le carême trop haut et pour vous éviter une pareille contrainte, vous vous êtes relâchée, vous vous êtes laissée aller aux entraînements de votre nature corrompue. La corruption de notre nature est donc la première cause de nos relâchements et de nos chutes. Chateaubriand a dit: « celui qui ne signe pas ses oeuvres est de basse origine ». Que d’actions, que de pensées rougirions-nous de faire connaître! Enflés de nos perfections, nous cherchons à faire croire aux autres que nous sommes bons et vertueux. Quel mensonge et quelle vanité! Or, dites-moi, qui d’entre vous n’est pas vaniteuse et qu’est-ce qu’une religieuse vaniteuse? Quand donc commencerez-vous à vous anéantir à cause de votre propre corruption? Mais, direz-vous, je suis régénérée par le baptême, je suis l’épouse de Jésus-Christ! n’importe, vous êtes corrompue. Si vous ne vous convertissez sincèrement, quel tas de fumier nous allons avoir l’année prochaine! et s’il en est ainsi de votre nature, quel soin ne devez-vous pas apporter à la réformer et à la transformer par l’imitation de votre divin modèle Jésus-Christ. Depuis votre dernière retraite nous avons pu juger de l’inconstance de votre volonté. Vult et non vult piger, l’homme lâche veut et ne veut pas. La neige quand il ne pleut pas, fond sans qu’on s’en aperçoive, sans que cela paraisse, ainsi en est-il de vos bonnes résolutions. On veut et on ne veut pas, vraie girouette on a des moments de dévotion et des moments de lâcheté, trouvez-vous que ce soit religieux? Nouvelle Pénélope, vous défaites aujourd’hui ce que vous avez fait la veille.
Maintenant vous représentez-vous la religieuse qui se croit grand personnage? Une âme qui ment ainsi à Dieu et qui se ment à elle-même ne peut pas éviter de tomber dans le péché. Et toutes ces prétentions, toutes ces vanités se développent, croyez-le, par le manque de silence et de recueillement. Aussi une communauté où l’on parle lorsqu’on ne devrait pas le faire est une communauté qui se perd si elle n’est pas morte. Souvenez-vous, mes filles, de ce que je vais vous dire: Je vous charge la conscience de toutes les paroles inutiles que vous direz pour vous d’abord et pour les autres que vous scandalisez. Et si le silence n’est pas observé parmi vous, j’imposerai comme pénitence la privation du Saint-Sacrement que l’on n’exposera pas toutes les fois que vous serez infidèles. Dans les conversations inutiles se trouve encore le péché de révolte et comment en effet ne voulez-vous pas pécher lorsque vous rejetez l’obéissance?
Et que dirai-je de la perte du temps. Ne savez-vous pas, mes filles, qu’en punition de son péché Adam fut condamné au travail et à la mort. Vous devez donc travailler en tant que filles d’Adam si vous ne voulez aller en enfer, ou rôtir dans le purgatoire. Voyez les illusions que vous vous faites par rapport au travail; on perd son temps non seulement en ne travaillant pas mais en travaillant mal. Or, la tâche qui vous est donnée, c’est que chacune travaille autant qu’elle en est capable. Voilà quel est votre devoir comme fille d’Adam, à plus forte raison comme religieuse qui a fait voeu de pauvreté. Tout votre temps est pris et vous ne pouvez l’employer à autre chose que la chose que l’obéissance vous prescrit. Voyez maintenant la relation qu’il y a entre les conversations inutiles et la perte du temps. Quelle constatation terrible! et cependant très vraie. N’est-il pas vrai, dites-moi, que Dieu a dit à Adam: « Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front ». Et comme religieuse, votre obligation n’est-elle pas de gagner votre vie? Examinez aux pieds de Notre-Seigneur dans quelle proportion vous devez être des religieuses laborieuses et silencieuses, et en quoi vous êtes peu sur ce point les épouses de Jésus-Christ qui travailla pendant tant d’années dans l’atelier de saint Joseph. Je voudrais bien savoir la différence qu’il y a entre une communauté qui travaille pour la forme et une communauté qui travaille par conscience. Quand vous perdez votre temps en conversations inutiles vous vous entretenez ou des personnes du dehors, ou du prochain du dedans ou de vos supérieurs et quand on déchire le prochain quel qu’il soit, comment peut-on arriver à la sainteté? Travaillez tant que vous le pourrez pendant le jour, la nuit vient ensuite pendant laquelle on ne peut plus rien faire.
Parlerai-je d’un autre obstacle: l’amour-propre. C’est cet amour-propre qui vient ruiner la vie religieuse de plusieurs manières.
1° L’égoïsme qui ruine la charité et met la désunion. Comment voulez-vous, en effet, qu’une communauté marche si les religieuses tirent chacune de leur côté. Qu’avez-vous fait pour l’union de la maison et qu’avez-vous fait pour combattre l’amour-propre qui désunit? A côté de ma soeur égoïste, de ma soeur vaniteuse, de ma soeur paon, apercevez-vous ma soeur fagot d’épines, n’y touchez pas ou craignez de vous piquer.
Et savez-vous maintenant, mes filles, quels sont les effets de l’amour-propre? Cet amour désordonné ôte le goût des choses de la foi. En effet, vous êtes des créatures et la foi vous fait voir toutes choses en Dieu et par rapport à Dieu, tandis que l’amour-propre ne vous les fait voir que par rapport à vous-même. Qu’est-ce, je vous prie, qu’une communauté où la foi a disparu? Et même j’irai plus loin et vous ferai observer que votre amour-propre est en opposition directe avec votre esprit d’Oblate.
Je terminerai en disant qu’il faut prendre la résolution généreuse de n’être plus personnelle et de vous corriger en tout ce que vous sentez être, dans votre coeur en opposition avec Notre-Seigneur Jésus-Christ crucifié et avec Notre-Dame des sept douleurs. Allez à la chapelle, représentez-vous Notre-Seigneur en croix, la Sainte Vierge d’un côté et vous de l’autre et dites-lui du fond du coeur: O mon divin Sauveur, c’est à vos pieds que je prends la résolution de combattre en moi tout ce qui vous déplaît et de vivre désormais en bonne et sainte religieuse.
Méditez en sa présence ces questions: Me convertirai-je?… Quand?… Comment?…
Oui, mes filles, vous vous convertirez sérieusement et généreusement. Vous ne remettrez pas votre conversion à demain, ce sera aujourd’hui même que vous commencerez et ce sera par l’esprit de pénitence et en imitant la très sainte Vierge que vous parviendrez à la perfection que l’on attend de vous.