- Instructions du mardi aux maîtres du collège
- L'image de la Trinité
- ECRITS SPIRITUELS, pp. 1345-1348, et Cahiers d'Alzon, 5, pp.96-101.
- CZ 88 (notes "d'une plume inconnue", M.S.).
- 1 ACTE DE CREATION
1 AMOUR DIVIN
1 AUGUSTIN
1 BAPTEME
1 CHARITE ENVERS DIEU
1 CONNAISSANCE DE DIEU
1 DIEU LE FILS
1 DIEU LE PERE
1 EDUCATION RELIGIEUSE
1 ETUDE DES PERFECTIONS DE DIEU
1 FAUSSE SCIENCE
1 FORMATION DES AMES DES ELEVES
1 HOMME CREE A L'IMAGE DE DIEU
1 INTELLIGENCE
1 MAITRES CHRETIENS
1 MISSION DES LAICS
1 PERES DE L'EGLISE
1 REFLEXION
1 SAGESSE DE DIEU
1 SAINT-ESPRIT
1 SPIRITUALITE TRINITAIRE
1 THOMAS D'AQUIN
1 VOIE UNITIVE
1 ZELE APOSTOLIQUE
2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI - Maîtres du collège
- COLLEGE maîtres
- novembre 1867
- NOV 1867
- Nîmes
- Maison de l'Assomption
L’éducation n’est pas seulement un enseignement, elle n’est pas seulement une purification; c’est encore, si je puis m’exprimer ainsi, une impression. Quand Notre-Seigneur envoya ses apôtres prêcher l’Evangile à toute la terre, il leur dit: Euntes docete… in nomine Patris et Filii et Spiritus Sancti. Pour créer l’homme, Dieu avait pris un peu de boue et avait dit: Faciamus hominem ad imaginem et similitudinem nostram. L’homme avait donc en soi l’image de Dieu; cette image le péché la détruit, le baptême la répare. Il en est de même de l’éducation, et le maître chrétien doit en quelque sorte buriner dans l’âme des élèves l’image de Dieu. L’éducation perfectionne cette image déjà réparée par le baptême; l’éducation est donc le supplément du baptême. Nous sommes chargés d’imprimer et de graver dans les âmes l’image de la très sainte Trinité.
In nomine Patris. Le Père représente pour l’intelligence humaine la faculté de recevoir ou plutôt de contenir les idées. Tout est en lui, jusqu’à la perpétuelle émanation, l’éternelle génération de son Fils. Si nous n’avons donc recours à ce Père céleste pour qu’il fasse descendre en nos âmes les idées dont il est la source, notre enseignement ne sera rien ou plutôt ce sera quelque chose de froid et de languissant. Nous serons de véritables perroquets qui ne parviendront pas même à faire des perroquets. Entrons donc, introduisons-nous dans ces idées, dans ces puissances du Seigneur dont parle le prophète: Introibo in potentias Domini. Quelles sont ces puissances du Seigneur? Ce sont les mystères divins, les actes par lesquels Dieu nous manifeste sa puissance. Voyez par conséquent combien elle est belle cette mission du professeur chrétien, pour un homme qui aurait un peu d’enthousiasme (Monseigneur me parlait l’autre jour d’un homme très vertueux, d’un saint homme, qui manquait d’enthousiasme); voyez, dis-je, quelle est belle cette mission du professeur chrétien: prendre les coeurs qui lui sont confiés et les conduire à l’union avec Dieu. Qu’on juge par là de l’absurdité de l’enseignement universitaire qui a la prétention de trouver quelque chose de plus beau que les puissances du Seigneur, potentias Domini, que les mystères divins qui doivent faire partie de l’enseignement chrétien. En effet, soit littérairement, soit philosophiquement, soit scientifiquement vous pouvez introduire les âmes des élèves dans ces mystères, dans ces puissances, dans ces points de vue divins de notre religion. Prenez ensuite l’enseignement qui découle de l’ensemble de ces sublimes vérités; peut-on trouver quelque chose de plus beau et de plus grand? Mais pour cela il faut connaître cette belle science de la religion, de la théologie; il faut entrer soi-même dans les puissances du Seigneur: Introibo in potentias Domini. Il est vrai que les paroles du prophète qui précèdent sont écrasantes pour le professeur: Quoniam non novi litteraturam, dit-il, introibo in potentias Domini. Mais qu’est-ce que cette littérature, sinon la vaine littérature, la vaine histoire, la vaine grammaire, la vaine rhétorique et la vaine science! La littérature n’est qu’un vêtement; mais c’en est un convenable, quand il est modeste. Quant au fond, à la base de l’enseignement, il doit être pris dans ces puissances du Seigneur où nous devons nous introduire afin d’y introduire les autres.
In nomine Patris et Filii. Mais ces idées ne suffisent point: il faut qu’elles soient combinées avec un certain ordre, une sagesse éternelle dont le modèle est la sagesse éternelle du Fils. Les idées sont indispensables sans doute; saint Thomas les appelle les archétypes; mais elles ne suffisent pas et il y a des professeurs pleins de connaissances et qui pourtant ne sont pas de bons professeurs chrétiens, parce qu’ils ne règlent pas leurs connaissances sur cette sagesse éternelle et immuable du Fils. Mettez ensemble un grand nombre de pierres, vous en ferez un tas; mais pour bâtir un édifice, un mur, il faut de l’ordre et une certaine combinaison, en un mot une intelligence. C’est par l’intelligence que le Verbe a fait toutes choses: Omnia per ipsum facta sunt et sine ipso factum est nihil quod factum est. C’est par le moyen de cette sagesse divine qu’il a donné à ses oeuvres la vie: Quod factum est, in ipso vita erat d’après la ponctuation admise par quelques Pères et par saint Augustin en particulier. Si vous voulez que votre enseignement soit vivant, conformez-vous donc à cette divine sagesse qui éclaire tout homme venant en ce monde. C’est vous qui devez être en quelque sorte les porte-flambeaux de cette lumière. Vous ne pouvez donc être de bons professeurs, des professeurs chrétiens, si vous ne portez, imprimée au fond de vos coeurs, l’image du Verbe, de la divine Sagesse, du Fils de Dieu.
In nomine Spiritus Sancti. Mais vous ne pouvez non plus vous passer du Saint-Esprit. Et qu’est-ce que le Saint-Esprit sinon l’amour qui unit le Père et le Fils; le professeur chrétien doit donc s’unir à Dieu par l’amour. C’est surtout ici le lieu de répéter ces paroles: Nemo dat quod non habet. Comment allumerez-vous dans les âmes ce feu de l’amour divin, si vos paroles ne sortent pas d’une âme enflammée de cet amour? Qu’il faut aimer Dieu et le faire aimer, c’est une vérité sans doute acceptée par manière de conversation, mais trop peu pratiquée par manière d’action. Et cependant l’éducation n’est plus rien sans cet amour qui la réchauffe et la vivifie. Quelle que soit la science que vous avez à communiquer, ne manquez jamais d’enflammer en même temps les âmes d’amour pour Dieu, en qui réside la science infinie.
Ces considérations pourraient se développer très longuement; je vous les livre donc. Méditez et tâchez de vous rendre bien compte de la magnifique mission qui vous est confiée, et quand vous commencerez votre classe par ces paroles: In nomine Patris et Filii et Spiritus Sancti, vous vous rappellerez que ces paroles sont en quelque sorte une classe que vous vous faites à vous-mêmes, afin d’apprendre à parler dignement de la très sainte Trinité qui seule peut vous communiquer d’une manière efficace la science, l’intelligence et l’amour. De cette façon vous graverez dans votre âme l’image de la sainte Trinité, vous la graverez dans l’âme de vos élèves et vous mériterez que cette très sainte Trinité soit votre récompense dans l’éternité. Ainsi soit-il.