Aux Assomptionistes

1877 Nîmes AA
Informations générales
  • Aux Assomptionistes
  • De la distinction surnaturelle
  • ECRITS SPIRITUELS, pp. 1117-1121.
  • CZ 86 (Orig.ms. du P. Edmond Bouvy).
Informations détaillées
  • 1 ACTION DU CHRIST DANS L'AME
    1 ASSOMPTIONNISTES
    1 BEAUTE DE DIEU
    1 BON EXEMPLE
    1 BONTE MORALE
    1 DEPASSEMENT DE SOI
    1 DIEU
    1 DISTINCTION
    1 EDUCATION
    1 EFFORT
    1 EGOISME
    1 ESPRIT CHRETIEN
    1 FORMATION DES JEUNES AUX VERTUS
    1 FORMATION DU GOUT POUR LE BEAU
    1 GENEROSITE
    1 GRANDEUR MORALE
    1 HUMANITE DE JESUS-CHRIST
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 INSENSIBILITE
    1 JESUS-CHRIST MODELE
    1 LAICS MEMBRES DE L'EGLISE
    1 NEGLIGENCE
    1 ORGUEIL
    1 OUBLI DE SOI
    1 PAIX DE L'AME
    1 PARESSE
    1 PERFECTIONS HUMAINES DE JESUS-CHRIST
    1 PERSEVERANCE
    1 PRETRE
    1 RELIGIEUX
    1 REPRESSION DES DEFAUTS DES JEUNES
    1 RESISTANCE A LA GRACE
    1 ROUTINE
    1 SAINTE COMMUNION
    1 SAINTETE
    1 SAINTS
    1 SAINTS DESIRS
    1 TENUE RELIGIEUSE
    1 TENUE SACERDOTALE
    1 TIEDEUR
    1 UNION A JESUS-CHRIST
    2 ANNE D'AUTRICHE
    2 BOUVY, EDMOND
    2 VINCENT DE PAUL, SAINT
  • Assomptionistes
  • AA
  • vers 1877
  • 1877
  • Nîmes
  • Maison de l'Assomption
La lettre

Ce qui la constitue.

Lorsque l’âme est grande et belle, cette grandeur et cette beauté s’extériorisent sur la physionomie; pendant la jeunesse surtout, le visage se modèle sur la forme du coeur. Quand la piété est vive, quand l’intelligence atteint toute sa puissance, quand les vertus fleurissent et portent des fruits, quand la conscience repose dans la paix, il y a dans les traits, dans la démarche, dans les actions, dans les paroles comme un brillant reflet de toutes ces splendeurs cachées.

Au contraire, si la tiédeur prend possession de l’âme, si l’esprit demeure inculte et stérile, si le coeur s’affadit dans les affections terrestres, si la vertu disparue trouble comme un remords tous les souvenirs, alors le visage semble perdre de son éclat, il n’y a plus que des traits vulgaires, sans délicatesse et sans vie, l’oeil ne s’illumine plus du feu intérieur, il semble que le corps se soit alourdi, que la parole soit devenue matière comme les affections, et que l’homme tout entier ait subi la déchéance de l’âme.

C’est cette alliance intime de la beauté du dedans et du dehors, ce rayonnement de l’âme sur son vêtement extérieur qui constitue la distinction surnaturelle.

Accessible à tous par l’effort.

Cette distinction, compagne de la sainteté, n’est pas le privilège d’une illustre origine: elle est accessible à tous, au berger comme au prince. Saint Vincent de Paul apportait dans les salons d’Anne d’Autriche sa pauvreté religieuse et l’humble souvenir de sa naissance obscure. Le paysan chrétien peut soutenir aussi noblement que les grands de la terre l’innocence de jeunesse ou l’honneur de ses cheveux blancs.

L’homme est placé sur un grand chemin; il a, d’un côté, une montagne escarpée, et de l’autre, un riant vallon. La montagne est presque déserte, mais la route du vallon est couverte de joyeux voyageurs: c’est la distinction et la vulgarité.

Pour se distinguer du vulgaire, il faut gravir cette pente difficile. La descente est plus commode, mais il y a des voies terribles qui annoncent une issue funeste.

Excelsior! Montons! Le sommet est devant nous et Dieu y habite, il faut des efforts, de la peine, de la persévérance, mais courage! Ayons les yeux sur notre idéal et son aimable présence nous fortifiera contre toutes fatigues.

Fruit de l’éducation.

La distinction, lorsqu’elle est le résultat d’une éducation noblement chrétienne, lorsqu’elle s’est même développée dans les premières luttes de la jeunesse, peut encore disparaître sur le seuil de l’âge mûr. La vie de routine et de tiédeur, l’habitude de l’oisiveté, l’attachement aux choses terrestres ramènent peu à peu l’âme à des sentiments moins élevés et les actions extérieures à une physionomie plus vulgaire.

De même, si votre enfance a été livrée à des éducateurs indignes, si vous avez vécu pendant longtemps dans l’étroit égoïsme qui gouverne le commun des hommes, si votre âme est restée jusqu’aujourd’hui dans ce terre-à-terre où le monde entier semble marcher, il n’est pas encore trop tard, livrez-vous à l’action de la grâce, luttez avec énergie contre votre pesanteur naturelle, vous vaincrez la vulgarité de votre enfance et vous prendrez l’essor de la distinction surnaturelle.

Ses variétés: le laïque.

Il y a la distinction du laïque; c’est la noblesse du chrétien. Dieu lui a fait un devoir de l’espérance en le destinant à la vie du ciel; son coeur doit être détaché de l’exil et fixé dans la patrie.

le prêtre.

Il y a la distinction du prêtre. C’est l’auréole de son sacerdoce. Ses lèvres doivent distiller la science, sa conversation doit être dans les cieux, tout son être doit se revêtir de cette distinction suprême qui est celle de Jésus-Christ.

le religieux.

Mais il y a aussi la distinction du religieux, du religieux apôtre, du religieux de l’Assomption. Sa vocation c’est d’être le chevalier, le héraut de Dieu. Quelle haute mission! Mais aussi quelle grandeur d’âme elle exige! Ce n’est pas assez que les sentiments terrestres soient vaincus, il faut qu’ils disparaissent.

Loin de nous cette vulgarité de la paresse qui affaiblit toutes les nobles facultés et projette sur le visage les traces de la langueur et de l’impuissance; cette vulgarité de la présomption, qui ramène tout à elle-même, qui ne voit que son propre mérite et n’agit que pour sa gloire; cette vulgarité de la résistance à la grâce qui pose des limites à la vocation divine, qui se refuse aux inspirations d’En-Haut, qui mesure le travail, la piété et le dévouement.

Soyons distingués par la générosité de nos sacrifices, distingués par la ferveur de nos initiatives, distingués par l’édification de nos exemples, distingués par l’enthousiasme de notre amour.

le saint.

La sainteté est la distinction poussée à son plus haut degré; le visage d’un saint resplendit d’un éclat particulier. Ce n’est pas une beauté corporelle, car les corps n’ont pas cette pureté de lumière; c’est une beauté qui dérive à la fois de l’intelligence et du coeur.

Un saint, plongé dans sa prière, quelle que soit la chétivité de ses traits, semble revêtu de la beauté même de Dieu; sa parole est douce et suave dans sa simplicité; sa démarche et toutes ses actions ont un cachet ignoré du vulgaire; on sent, à son approche, que Dieu est avec lui, que Dieu parle par sa voix, agit dans ses actes, et nous bénit par sa main.

Dieu.

Dieu est le suprême idéal de la distinction comme de la sainteté, il n’y a qu’un Dieu parce qu’il est seul infini, et il n’y a que peu de saints parce qu’il y a trop d’hommes vulgaires. Il n’y a qu’un Dieu qui nous invite à la perfection et se propose Lui-même comme notre modèle.

Jésus-Christ.

Mais pour moins effrayer notre faiblesse, il a envoyé son Fils qui ne fait qu’un avec Lui et ce Fils s’est fait homme: Ecce homo! Le voilà, l’exemplaire unique de la sainteté et de la distinction, l’idéal que nous apercevons de loin sur la montagne et qui nous appelle à lui pour nous perdre dans sa lumière, le plus beau des enfants des hommes, dont la divinité rejaillit à travers les pores de son humanité, le type que nous devons reproduire en imitant sa vie et en embrassant sa croix, en réglant notre coeur sur le sien, en mourant à nous-mêmes pour vivre par lui et en lui.

Oh! si nos prières, si nos oraisons, si nos communions sont ferventes, si à ce moment surtout, où Jésus-Christ, après avoir passé sur nos lèvres, pénètre dans le sanctuaire de nos coeurs, nous écoutons ses inspirations ineffables, si nous nous laissons échauffer du feu qu’il est venu porter sur cette terre, si nous nous unissons à Lui par une étreinte indissoluble, si nous l’aimons autant que notre coeur peut aimer, quels changements rapides dans notre vie!

Notre Bien-Aimé, qui se plaît parmi les lis, fera germer en nous ces fleurs de sa prédilection. La chasteté disparue refleurira pour un nouveau printemps. Puis viendront les fruits de grâce et de salut.

C’est alors que notre intelligence se dressera dans la puissance de son humilité, que le coeur s’agrandira pour renfermer Dieu lui-même, que l’âme, comme la colombe, se sentira des ailes pour fuir la vulgarité de la terre, et que, désireuse de cette distinction qui est ici-bas la couronne de la sainteté et qui sera au ciel la couronne des élus, nous prendrons l’essor vers les régions élevées de la perfection, portant sur nos visages le reflet des splendeurs qui nous attendent.

Notes et post-scriptum