- TD 41.212
- OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|COURS DE THEOLOGIE MYSTIQUE AUX OBLATES
- XIX.
[L'INTELLIGENCE DE L'HOMME] - Théologie Mystique. Conférences données aux Oblates de l'Assomption en 1872. Pro manuscripto. Paris, Imprimerie Maison Mère des Oblates de l'Assomption, 1966, p. 47 à 49.
- CN 13; TD 41., P. 212-213.
- 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
1 AME
1 AUGUSTIN
1 ECRITURE SAINTE
1 ETRE HUMAIN
1 INTELLIGENCE
1 MEMOIRE
1 VERTU D'OBEISSANCE
2 FRANCOIS DE SALES, SAINT - Oblates de l'Assomption
- juin 1872
- Nîmes
L’intelligence de l’homme est un être passif, c’est-à-dire qu’il reçoit, qu’il supporte. Patient vient de passif et pati, en latin, veut dire souffrir; ainsi, en parlant des souffrances et de la mort de Notre-Seigneur, on dit la Passion. L’âme est donc susceptible de recevoir des impressions de joie ou de tristesse; les êtres matériels peuvent bien recevoir certaines impulsions, mais les impressions intellectuelles ne peuvent être reçues que par l’âme intelligente.
On dit que la mémoire est la première faculté de l’âme parce que c’est la mémoire qui reçoit les idées; idée, en grec idea, veut dire voir, c’est ce qui a fait dire à saint Augustin que Dieu voyait dans son Verbe les idées de toutes choses. En latin, le mot idée se traduit par specimen qui veut dire vue et beauté. Aussi saint François de Sales, ne voulant pas écrire l’adjectif belle, dit « des dames spécieuses. »
L’âme reçoit l’idée des choses qu’elle voit, mais, pour les choses qu’elle ne voit pas, elle n’en a pas l’idée par elle- même, si rien ne vient la lui donner comme conséquence de ce qu’elle connaît déjà; ainsi elle n’a pas réellement l’idée de Dieu, ne l’ayant vu; elle ne peut se le représenter. On peut comparer l’âme a une table rase qui, par elle-même, n’a rien et n’est propre qu’à recevoir les objets qu’une intelligence supérieure viendra y déposer. C’est un être immobile qui ne peut se mettre en mouvement que par l’impulsion que Dieu lui donne, mais qui, une fois mis en mouvement, peut agir non comme une machine, d’une manière fatale, mais dans sa volonté.
C’est ici qu’il faut parler de l’intellect agent; la mémoire reçoit les idées d’une manière passive, mais, une fois reçues, l’intelligence se les approprie et devient alors agent, c’est-à-dire qu’elle a la faculté d’agir sur elle- même et sur ce qui lui a été donné.
Saint-Augustin découvre deux choses dans le travail intellectuel: la conscience que l’on a de savoir et la conscience que l’on a de vouloir; aussi je comprends, disait-il, que je comprends et que je veux; c’est un sentiment intime que l’on a de ce qu’on possède en science et en volonté. Nous possédons donc ces deux facultés: recevoir les idées; par les êtres matériels, nous pouvons nous élever aux êtres invisibles en remontant à la première cause; mais malgré nos efforts, nous ne pourrons jamais arriver à la parfaite compréhension de Dieu; c’est pour cela qu’il est dit dans le Pentateuque qu’on ne voit Dieu que par derrière, c’est-à-dire qu’on aperçoit Dieu dans ses oeuvres et dans ses effets, mais, pour l’essence même de Dieu, il nous est impossible de la voir.
Voilà les conclusions que je pense déduire de ces considérations: Puisque je suis un être passif, je dois remercier Dieu de tout ce qu’il m’a donné et me placer entièrement sous son mouvement. La proportion avec laquelle je m’abandonne à sa divine volonté sera la mesure de la sainteté que j’acquerrai pour le ciel. Le mouvement naturel de l’homme, depuis le péché, est de se séparer, de s’éloigner de Dieu, et la perfection consiste à remonter ce courant du mal, à ne penser et à ne vouloir que comme Dieu pense et veut. C’est surtout par l’obéissance que l’on arrive à ce résultat, car, c’est en obéissant que l’on accomplit la volonté de Dieu, et par cet exercice constant et journalier, nos pensées s’épurent, nos sentiments se perfectionnent et notre volonté tend sans cesse vers Dieu.