- OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE MOIS DE MARIE
- SIXIEME JOUR
CHARITE DE MARIE - Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 366-370.
- BH 5.
- 1 AMOUR DE DIEU POUR SA CREATURE
1 CHARITE DE MARIE
1 CHARITE ENVERS DIEU
1 DEPASSEMENT DE SOI
1 ESPERANCE
1 FOI
1 HUMILITE DE JESUS-CHRIST
1 IMITATION DE LA SAINTE VIERGE
1 MERE DE DIEU
1 MOIS DE MARIE
1 ORAISON DOMINICALE
1 PERFECTIONS DE MARIE
1 PRIERE A LA SAINTE VIERGE
1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
1 VERTU D'OBEISSANCE
2 JEAN, SAINT
2 LUC, SAINT
2 MATTHIEU, SAINT
2 MOISE
3 SINAI - 1875
La charité est une amitié accompagnée de bienveillance et de réciprocité,
Examinons: I° quelle est cette vertu; 2° quelle fut la charité de Marie; 3° quelle doit être la nôtre.
I. Caractère de la vertu de charité.
I° C’est une amitié pour Dieu. Quelle étrange parole! Mais ce qu’il y a de merveilleux, c’est que c’est Dieu qui commence. Iam non dicam vos servos. Vos amici mei estis(1). Ainsi nous sommes les amis de Dieu, et cette amitié implique de la bienveillance. Qui en doute quand nous voyons ce que Dieu a fait pour nous. Mais nous aussi, chose étrange, nous devons être bienveillants pour Dieu. De là les trois premières demandes du Pater: Sanctificetur nomen tuum, adveniat regnum tuum, fiat voluntas tua(2). Quant à la réciprocité, que dire? Dieu nous aime; dès que nous l’aimerons, la charité sera réciproque.
2° Mais la charité ne cherche pas l’objet qu’elle aime pour un avantage [personnel]. Caritatem voco motum animi ad fruendum Deo propter ipsum, dit saint Augustin (3). La foi cherche Dieu pour la vérité qu’elle reçoit; l’espérance, pour la vie éternelle qu’elle attend; la charité cherche Dieu pour se fixer en lui: ut in Deo sistat dit saint Thomas(4).
Aussi comme la règle supérieure de nos actes, et par conséquent des vertus, est Dieu, la charité, qui est un acte par lequel nous cherchons Dieu pour Dieu, est la plus parfaite des vertus, et à proprement parler, sans charité il n’y a pas de [vraie] vertu.
II. Charité de Marie.
Prévenue de grâces comme Marie l’a été, la charité de Dieu pour elle n’est- elle pas incontestable? Quant à la charité de Marie pour Dieu, où en trouver une plus pure dans une créature humaine? De quoi sa vie tout entière est-elle préoccupée? De Dieu et de Dieu seul. La bienveillance y est, certes, et c’est Dieu qui est le mobile très unique de tout ce qu’elle fait: Ecce ancilla Domini(5). Amour obéissant, c’est-à-dire voulant se montrer de la façon que l’objet aimé le désire; amour très unique: Magnificat anima mea Dominum(6).
Où trouver une charité plus forte? Depuis le premier instant de l’Incarnation jusqu’à la mort du Sauveur, quelle tendresse pour Jésus son Dieu accrue par sa tendresse pour Jésus son Fils! Mais comme la tendresse pour le Fils est effacée par la charité pour le Dieu! Ah! tout y est sacrifié, et c’est pourquoi dans l’amour, le silence, la douleur la plus profonde, elle participe au mystère de la Rédemption comme elle avait participé à la naissance d’un Dieu, naissant avec la plus grande humilité au milieu du plus profond dénuement. Quant à son amour dans le ciel, son Fils seul pourrait nous le dire. Seulement cet amour s’étend sur tout ce que son Fils aime, et elle nous aime comme nous aime son Fils.
III. Charité de Marie modèle de notre charité.
Il y a ici peu à dire, puisque nous n’avons qu’à méditer et à faire. Inspice et fac(7) et (8). Mais pourtant, en nous repliant sur nous-mêmes, quelles profondeurs d’ingratitude ne trouverons-nous pas, si nous comparons notre charité pour Dieu à celle de Marie! C’est pourquoi il faut accroître sans cesse cette vertu, la plus parfaite de toutes, et la grâce qui ne nous manquera pas étant supposée, il faut que nous dirigions notre plus grand effort vers l’accroissement de l’amour par les actes. Or, voici une chose merveilleuse. Le terme de nos actions étant Dieu, c’est lui qui les vivifie et les règle. Mais pour aller à Dieu il faut le vouloir, l’aimer.Tous mes actes, toutes mes vertus, pour être surnaturelles, doivent être marquées d’un cachet surnaturel de charité. La charité est la condition essentielle des vertus. Sans charité il n’y en a aucune [de vraie]. C’est elle qui leur donne la forme, leur raison d’être, et leur faiblesse ou leur vigueur dépend de la faiblesse ou de la vigueur de la charité.
Combien n’est-il pas nécessaire de demander à Marie d’accroître en nous la charité, au nom de son amour pour son Fils et pour son Dieu.
Enfin, si la vertu de pauvreté correspond à la vertu d’espérance, la vertu d’obéissance correspond à la charité. Disons donc avec un grand amour: Ecce ancilla Domini(9).
9. Il semble que le P. d'Alzon, en écrivant cette si doctrinale méditation, ait eu sous les yeux la q. XXIII de la IIa-IIae de saint Thomas, dont les huit articles forment la substance très condensée de ces quelques pages. Le Père y ajoute de pieuses applications à Marie.1. "Je ne vous appellerai plus serviteurs."(Ioan. XV, 15.) "Vous êtes mes amis." (Ioan. XV, 14.)
2. "Que votre nom soit sanctifié, que votre règne arrive, que votre volonté soit faite." (Matth. VI, 9, 10.)
3, "J'appelle charité le mouvement de l'esprit qui nous porte à jouir de Dieu à cause de lui-même." (*De doctr, christ, III, 10.)
4. IIa-IIae, q. XXIII, *De charitate secundum se, art VI.
5. "Voici la servante du Seigneur." (Luc. I, 38.)
6. "Mon âme glorifie le Seigneur." (Luc. I, 46.)
7. "Regarde et fais [selon le modèle qui t'a été montré sur la montagne]."(Ex. XXV, 40.)