- OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE CAREME
- SAMEDI DE LA TROISIEME SEMAINE DE CAREME
[SUR L'EVANGILE DE LA FERIE: Ioan. VIII, 1-11] - Méditations sur la Perfection Religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 258-260.
- CO 6-7
- 1 ADULTERE
1 CAREME
1 HYPOCRISIE
1 JESUS-CHRIST AUTEUR DU PARDON
1 MISERICORDE
1 MISERICORDE DE DIEU
1 PECHE
1 PREDICATION
1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
1 SOUVERAIN JUGE
1 VIE DE PRIERE
2 JEAN, SAINT - 1875
I. L’heure de la mort approche pour Jésus. Il semble multiplier sa prière pendant la nuit, sa prédication pendant le jour, unissant ainsi constamment les deux grandes armes du religieux apostolique: l’oraison et le ministère de la parole. Jésus-Christ attire par ce charme divin qui lui est propre, mais n’indique-t-il pas lui-même en quoi le charme consiste? La prière qui précède la prédication. Sans doute on voit des prédicateurs prier fort peu et pourtant attirer. Quel fruit produisent ces hommes-là? Et moi, si j’attire, puis-je dire que j’ai préparé le charme mystérieux par une prière fervente?
II. On lui présente une femme surprise en adultère. On veut le tenter. La condamnera-t-il? Sans doute, personne plus que le souverain Juge n’avait le droit de prononcer une sentence. Mais il ne le veut pas. Et à une habileté satanique il opposera une habileté divine: l’habileté de la simplicité. Jésus-Christ s’incline, et avec son doigt il écrit sur la terre. Qu’écrivait-il? Les commentateurs supposent que c’était la réponse qu’il va adresser à ses tentateurs: « Qui sine peccato est vestrum, primus in illam lapidem mittat: Que celui d’entre vous qui est sans péché lui jette la pierre le premier. » C’était cruel, mais c’était mérité. Du même coup, Jésus déchire le voile des turpitudes pharisaïques. En effet, sans regarder ses interrogateurs, il se penche de nouveau et écrit encore. Or, pendant qu’il écrit, les pharisiens le laissent l’un après l’autre; leur ardeur accusatrice s’est tout à coup dissipée. Ils se sentent pris dans le piège qu’ils avaient creusé eux-mêmes. « Audientes unus post unum exibat, incipientes a senioribus: Ayant entendu cela, ils se retirèrent l’un après l’autre, en commençant par les plus âgés. » Telles étaient les moeurs de la société judaïque, et Jésus prenait ces fameux zélateurs de la loi en flagrant délit. Qu’écrivait-il encore cette seconde fois? Peut-être les noms des coupables et l’indication des crimes de chacun. Hélas! combien de fois, en accusant les autres, ne me suis-je pas exposé à trouver au fond de moi-même ma propre accusation.
III. Enfin, ils se retirèrent, et de toute cette foule, il ne reste que Jésus et la femme qu’on voulait le forcer à condamner. Alors Jésus se lève. Au lieu d’une condamnation à porter, il préfère absoudre. « Femme, où sont ceux qui vous accusaient? Quelqu’un vous a-t-il condamnée? » Elle répond: « Personne, Seigneur. » Légalement, en se retirant, elle était dans son droit, et Jésus pouvait l’inviter à en user, surtout en la comparant à ses délateurs impunis. « Nec ego te condemnabo: vade et iam amplius noli peccare: moi non plus, je ne te condamnerai pas, va, et désormais, ne pèche plus. » Il ne lui cache pas qu’il la croit coupable, mais il préfère, en l’absolvant, lui ouvrir la porte du repentir.
Que les tribunaux humains jugent d’après leurs lois, ils le doivent; mais que l’homme de Dieu se souvienne qu’au-dessus du jugement il y a la miséricorde, celui de tous les attributs de Dieu que nous devons le plus aimer, puisque c’est celui dont nous avons le plus besoin pour nous faire pardonner nos fautes. Heureux le religieux qui, à l’imitation de Jésus, tout en maintenant la règle, la remplace, quand il le peut, par cette miséricordieuse indulgence qui montre à l’âme toute la profondeur de l’abîme où elle est tombée, tout en lui laissant l’espoir et le moyen d’en sortir.