Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.357

• T1-357
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• Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.357
• Orig.ms. ACR, AN 44; D'A., T.D. 38, n. 44, pp. 176-178.

• 1 APOSTOLAT
  1 BON EXEMPLE
  1 CAUSE DE L'EGLISE
  1 DIACONAT
  1 ESPRIT MONASTIQUE
  1 OEUVRES SOCIALES
  1 PAUVRE
  1 PETITES PROTESTANTES
  1 PRATIQUE DE LA PAUVRETE
  1 PROTESTANTISME
  1 SACERDOCE
  1 SCANDALE
  1 VIE DE PRIERE
  1 VIE SPIRITUELLE
  1 VOEUX DE RELIGION
  2 ALMEIDA, MADAME D'
  2 AUBINEAU, LEON
  2 GERBET, PHILIPPE-OLYMPE
  2 JOSEPH, SAINT
  2 MAUBEC, MADAME DE
  2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI
  3 ALES
  3 NIMES
  3 PERPIGNAN
  3 RENNES
  3 TOURS
• A MADEMOISELLE AMELIE DE PELISSIER
• ESCURES Comtesse
• le] 27 déc[embre], minuit [ 1853].
• 27 dec 1853
• [Nîmes,
• Mademoiselle
  Mademoiselle Amélie de Pélissier
  13, avenue Marbeuf, près les Champs Elysées
  Paris.

A force de suivre votre conseil et de prendre mon temps pour réfléchir, j’ai fini par ne pas vous répondre. Je vais faire d’une pierre deux coups, ma fille, car j’ai là deux lettres de vous devant moi.

Plus je pense aux observations de ces demoiselles, plus je crains que nous ne puissions nous entendre. Quant aux diaconesses, nous sommes devancés par les protestants; ils ont le nom et la chose, à leur façon, il est vrai, mais ils l’ont depuis peu. Les singer me répugnerait. Quant à eux, déjà il y a pas mal d’histoires sur ce qui se passe dans leurs maisons; et prendre leur enseigne, c’est s’exposer à prendre leur vernis qui n’est pas beau.

Que veulent-elles dire avec la distinction entre l’esprit apostolique et l’esprit monastique? L’esprit monastique est, il faut le reconnaître, ce qu’il y a de plus parfait dans l’Eglise au point de vue de la perfection personnelle; et quant à l’esprit apostolique, il faut s’entendre. Si l’on veut dire par là le zèle pour le salut des âmes, toutes les Congrégations, tous les Ordres voués aux oeuvres de charité ont cet esprit. En dehors de cela, l’esprit apostolique c’est l’esprit du sacerdoce, à quoi les femmes n’ont rien à voir puisque Notre-Seigneur n’a pas voulu qu’elles fussent prêtres.

Entendons-nous donc bien. Veut-on dire qu’en conservant les idées catholiques de perfection là où l’Eglise les a constamment placées, c’est-à-dire dans les vertus qui se rapportent aux voeux de religion, on peut modifier les applications selon les circonstances? Je suis parfaitement de cet avis. Mais alors pourquoi ce dédain pour l’esprit monastique? Veut-on dire que l’Eglise consentira à placer la perfection ailleurs que là où elle l’a constamment placée, pour nous donner un sacerdoce d’une nouvelle espèce, sinon dans le caractère, au moins dans l’esprit? J’avoue que je suis épouvanté. [1] Du reste, la question va être tranchée d’une manière pratique. Voilà l’abbé Gerbet évêque.[2] Peut-être va-t-il fonder ses diaconesses à Perpignan? Je vous promets que, si l’oeuvre réussit, je ferai tout au monde pour les attirer à Nîmes. Mais réussiront-elles? C’est là la question.

J’ai beau avoir le désir d’être de votre avis, je ne puis vous dire autre chose, parce que mon opinion repose sur des principes si évidents pour moi qu’il m’est impossible d’envisager les choses autrement que sous un point de vue sévère, non pas pour les intentions de ces demoiselles que je crois très saintes, mais par rapport au terme où elles aboutiront infailliblement selon moi; et ce terme sera un avortement complet, ou bien une source de grands dangers pour le sacerdoce et de bien des scandales. En attendant, l’oeuvre des protestants marche. On m’offre de toutes parts des petites filles protestantes; on les case comme on peut, mais cela se remue et ferme.

J’ai écrit à M. Léon Aubineau pour avoir des Petites Soeurs des Pauvres. Puisque vous allez quelquefois visiter ces saintes filles, dites-leur donc qu’une fondation à Nîmes aurait un double avantage: 1° sans doute le soulagement des vieillards, mais, 2° surtout elles seraient un argument excellent en faveur de l’Eglise catholique. Il faudrait qu’en venant ici elles consentissent à commencer avec la pauvreté des fondations de Tours et de Rennes. C’est ce qui produirait sur nos protestants un merveilleux effet.

Laissez-moi vous remercier de tous vos voeux de vraie fille, mais aussi j’aurais bien voulu vous avoir ici, où nous avons tout à faire. Il faudra bien que nous nous y mettions. Devenez une sainte, priez tous les jours un peu plus, cherchez beaucoup Notre-Seigneur. Que faites-vous en fait de pratiques de pauvreté? Vos terreurs de la mort continuent-elles? Ma pauvre enfant, que je vous voudrais près de moi!

Il faut que vous me fassiez une commission. C’est une jolie statue de saint Joseph, d’un mètre 60 de hauteur, en carton-pierre, qu’il faudrait me procurer. On irait au-delà de 200 francs. Il semble que pour ce prix, on peut avoir quelque chose de très bien. Voyez. Il faudrait la faire expédier à Mme de Maubec, née Cambis, à Alais.

Adieu, ma bien chère enfant. Offrez mes hommages à Mme d’Almeida. Dites-lui donc de venir nous fonder des Petites Soeurs à Nîmes.[3] Tout à vous, mon enfant, avec la plus grande affection.