Vailhé, LETTRES, vol.3, p.519

21 dec 1849 Avignon, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Bonnes décisions du Concile. -Son indisposition. -Au sujet des voeux solennels de religieuses. -Son état intérieur. -Ses résolutions. -Sur le gallicanisme de l’archevêque de Paris.

Informations générales
  • V3-519
  • 0+665|DCLXV
  • Vailhé, LETTRES, vol.3, p.519
Informations détaillées
  • 1 CAUSE DE L'EGLISE
    1 CELEBRATION DE LA MESSE PAR LE RELIGIEUX
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 CONCILE PROVINCIAL
    1 GALLICANISME
    1 IMMACULEE CONCEPTION
    1 LITURGIE ROMAINE
    1 SANTE
    1 SUSCEPTIBILITE
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    1 VOEUX SOLENNELS
    1 VOLONTE
    1 ZELE APOSTOLIQUE
    2 GOODMAN
    2 MARTIN, JESUITE
    2 SIBOUR, MARIE-DOMINIQUE
    3 NIMES
    3 PARIS
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS (1).
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • le 21 décembre 1849.
  • 21 dec 1849
  • Avignon,
La lettre

Enfin, j’ai une heure à moi, ma chère fille, et, à moins d’en être empêché – ce que je ne prévois pas,- je pourrai causer un peu à l’aise avec vous. Le Concile touche à sa fin. Je crois qu’il aura eu du bon. Si tout n’y a pas été parfait, du moins peut-on dire que l’ensemble en est profondément catholique. Nous demandons la définition du dogme de l’Immaculée Conception; on annonce le rétablissement de la liturgie romaine.

Le 22 décembre.

Ce n’est personne autre qu’une forte irritation d’entrailles, qui m’a forcé hier à m’arrêter et à me mettre au lit sans souper. Aujourd’hui, grâce à Dieu, je vais bien et je vous parlerai un peu à l’aise, en attendant la Congrégation générale qui doit avoir lieu à 10 heures. Je ne veux pas oublier de vous dire que j’ai abordé la question des voeux solennels, et, quoique les évêques n’aient voulu prendre aucune décision, il a été évident que tout ce qu’il y a de plus important comme science, gravité et piété, se prononçait en faveur des voeux solennels. Le P. Martin, le premier théologien qu’aient les Jésuites en France, m’a promis de s’occuper de cette question et de trouver le biais à prendre, pour que les Congrégations de femmes puissent faire des voeux solennels, tout en prévenant les difficultés que l’on tire de la législation actuelle. Du reste, s’il ne s’en occupe pas, je m’en occuperai et je crois que nous viendrons à bout de quelque chose.

Voilà pour le Concile. Quant à ce qui me concerne, je ne suis pas du tout content de moi. Si je m’envisage un peu sérieusement, je découvre des montagnes de misères, une foule de mobiles humains qui me font agir, de l’amour-propre, de la susceptibilité, de la rancune. Il est très vrai d’ajouter que je n’ai pas dit la messe de tous ces jours, et, quoi qu’en disent les évêques, quand je ne la dis pas, je ne suis pas bon à donner aux chiens. Hier, où j’ai pu la dire par faveur, j’ai passé une bien meilleure journée. Je suis épouvanté de tout le mal que je découvre en moi et des énormes difficultés que j’aurai pour déraciner cela, pendant le peu de temps que Dieu me donne pour en venir à bout. Cependant, je veux; je veux avec force et persévérance, il me le semble du moins.

Voilà, ma chère fille, où en est votre pauvre père, que vous trouvez si édifiant. Cependant, ce qui résulte pour moi de toutes mes réflexions, c’est l’obligation de prendre tous les jours plus à coeur la cause de l’Eglise, dans la mesure du travail qui me paraît assignée. Je m’aperçois que j’aurais pu faire beaucoup plus de bien, si j’avais eu plus souvent le zèle pour parler dans une foule de circonstances, où ma parole fût tombée sur des terres bien préparées. Enfin, je rentre à Nîmes avec la préoccupation de faire à mes enfants et à mes professeurs tout le bien que je pourrai. Prêchez-moi beaucoup dans ce sens, ma fille. Vous savez quel bien vous êtes appelée à me faire; ne le négligez pas.

Demain, je m’en retourne coucher à l’Assomption et j’espère y trouver une lettre de vous, qui m’apprendra ce que vous devenez; car, il y a un siècle que je n’ai rien reçu de vous, et je ne sais si je dois vous dire que je trouve le temps long ou porter devant le bon Dieu cette petite mortification sans me plaindre.

Ce que vous me dites du gallicanisme de l’archevêché de Paris ne me surprend pas le moins du monde, mais il ne faut pas s’en tracasser. Le bon archevêque se laissera faire, pourvu qu’on ait toujours auprès de lui quelqu’un pour le pousser, et, sous ce rapport, je crois que quelques personnes feraient bien de le voir un peu plus souvent. On peut lui faire croire qu’il veut bien des choses, sans qu’il s’en doute. Et M. Goodman? J’y tiens beaucoup. Tâchez donc de me faire venir ce jeune homme.

Adieu. Je ne suis pas du tout vaillant et je n’ai pas la force de commencer une cinquième page. Mille fois tout à vous en Notre-Seigneur.

Notes et post-scriptum
1. D'après une copie. Voir *Notes et Documents*, t. IV, p. 673, 690, 697.1. D'après une copie. Voir *Notes et Documents*, t. IV, p. 673, 690, 697.