- V1-034
- 0+011|XI
- Vailhé, LETTRES, vol.1, p.34
- 1 AMITIE
1 BUT DE LA VIE
1 CHOIX
1 DEFAUTS
1 DELIBERATION
1 DESIR
1 FONCTION SACERDOTALE
1 LIVRES
2 BAILLY, EMMANUEL
2 DAUBREE, LEON
2 DREUX-BREZE, PIERRE-SIMON DE
2 DU LAC, JEAN-MELCHIOR
2 ESGRIGNY, MADAME LUGLIEN D'
2 FORTOUL, HIPPOLYTE
2 FRANCOIS DE SALES, SAINT
2 GOURAUD, HENRI
2 GOURAUD, HENRI-JOSEPH
2 HOLBERG, COMTE DE
2 LA GOURNERIE, EUGENE DE
2 LAMENNAIS, FELICITE DE
2 NAPOLEON III
2 VEUILLOT, LOUIS
3 CHESNAIE, LA
3 ESPAGNE
3 LOIRE-ATLANTIQUE
3 MALESTROIT
3 PARIS
3 POULIGUEN, LE - A MONSIEUR LUGLIEN DE JOUENNE D'ESGRIGNY (1).
- ESGRIGNY Luglien de Jouenne
- jeudi, 21 janvier [1830].
- 21 jan 1830
- [Paris],
- Monsieur
Monsieur Luglien de Jouenne,
Rue Duphot, n° 11.
Paris.
Vous en penserez ce que vous voudrez, mon très cher, mais ma première lettre sera sérieuse, et je commencerai ma correspondance par m’ouvrir à vous sur un sujet, dont j’aurais dû vous parler déjà, puisque d’autres personnes que je ne visite pas plus que vous en sont déjà instruites.
Que pensez-vous que je doive faire? Sous quel point de vue considérez-vous l’avenir pour moi? Vous l’avez deviné peut-être -et vous n’apprendrez rien de nouveau -que j’espère marcher sur les traces de du Lac, et que tout mon bonheur serait de le voir avec moi à Malestroit ou à la Chesnaie(2). Voilà ce que, pour le moment, je désire avec le plus d’ardeur et ce que je voudrais voir se réaliser avant peu. Qu’il serait à souhaiter que les obstacles de notre pauvre ami ne fussent pas plus insurmontables que ceux que j’aurai à combattre, si tant est que quelque chose s’oppose à mon dessein!
Comme, aujourd’hui, la position d’un prêtre est admirable! Et puis, ce n’est pas la position que je considère seulement. Tous les sacrifices que je croyais devoir faire me coûtaient peu: ils étaient faits, et j’étais étonné que cela me parût si peu de chose que je n’avais pas encore levé les yeux pour regarder la place à laquelle j’aspirais. Ce n’a été que lorsque ç’a été une chose presque décidée par moi que j’ai envisagé le but que je me proposais.
Il y a eu suspension d’idées. Fortoul(3), Gouraud(4) Daubrée ont passé par ma chambre depuis que je vous ai parlé de moi. Fortoul, Daubrée s’en sont allés; Gouraud est au coin de mon feu à s’extasier sur le comte de Holberg, à dire: C’est ça, à m’interrompre pour me lire un passage de saint François de Sales. Il est trop heureux, il a trouvé un passage, dans le traité de l’Amour de Dieu, qui lui convenait, ou plutôt il en a trouvé une douzaine qu’il faut qu’il me lise ou que je lise moi-même. C’est une chose charmante que d’écrire, causer et lire avec ses amis, pour ses amis, et à ses amis. Ma phrase est embrouillée et pourtant très vraie.
Du Lac paraît avoir de grandes peines. Ce pauvre garçon vous en aura peut- être parlé. J’en suis à attendre de ses nouvelles. Ne trouvez-vous pas que j’écris assez illisiblement? comme je lis assez inintelligemment, comme je pense assez obscurément, ou plutôt comme je ne pense pas du tout, comme trouve Brézé(5).
Je suis assez embarrassé. Gouraud m’attend pour causer. Je voudrais bien causer avec vous. Vous voyez que je suis partagé. Je lui laisse la plume.
[Suivent quelques lignes d’Henri Gouraud; puis d’Alzon reprend la plume et écrit ces simples mots.]
Bonsoir.
EMMANUEL.Le comte Luglien de Jouenne d'Esgrigny, l'ami de coeur, avec du Lac, d'Emmanuel d'Alzon, l'avait connu à Paris dans la même société que fréquentait Eugène de La Gournerie. Il était né en 1806, étudia le droit dans la capitale et fut un des rédacteurs ordinaires du *Correspondant*. Il ne se maria qu'assez tard avec Mlle Louise Arthémise Milleret d'Omiécourt, décédée le 26 juin 1879, et vivait encore le 18 août 1886 où il écrivait en Espagne au R. P. Emmanuel Bailly, après lui avoir communiqué les si nombreuses et si intéressantes lettres que son ami d'Alzon lui avait écrites durant leur jeunesse. Une fois marié, le comte d'Esgrigny habitait tantôt Paris, tantôt le Pouliguen, dans la Loire-Inférieure, où il offrait généreusement l'hospitalité à Louis Veuillot, qui en parle souvent dans ses lettres.1. Voir des extraits dans,*Notes et Documents*, t. 1er, p. 120.
Le comte Luglien de Jouenne d'Esgrigny, l'ami de coeur, avec du Lac, d'Emmanuel d'Alzon, l'avait connu à Paris dans la même société que fréquentait Eugène de La Gournerie. Il était né en 1806, étudia le droit dans la capitale et fut un des rédacteurs ordinaires du *Correspondant*. Il ne se maria qu'assez tard avec Mlle Louise Arthémise Milleret d'Omiécourt, décédée le 26 juin 1879, et vivait encore le 18 août 1886 où il écrivait en Espagne au R. P. Emmanuel Bailly, après lui avoir communiqué les si nombreuses et si intéressantes lettres que son ami d'Alzon lui avait écrites durant leur jeunesse. Une fois marié, le comte d'Esgrigny habitait tantôt Paris, tantôt le Pouliguen, dans la Loire-Inférieure, où il offrait généreusement l'hospitalité à Louis Veuillot, qui en parle souvent dans ses lettres.
2. Les deux écoles où s'étaient groupés et se formaient les jeunes disciples de l'abbé de la Mennais.
3. Fortoul, né à Digne en 1811, mort à Ems en 1856. D'abord professeur de littérature dans plusieurs Universités, puis ministre de l'Instruction publique sous Napoléon III.
4. Gouraud Henri, né à Paris, célèbre médecin, le grand-père du général. Plusieurs des lettres qu'il adressa à Emmanuel ont été conservées.
5. Pierre de Dreux-Brézé né le 2 juin 1811 à Brézé, dans le Maine et-Loire, mort évêque de Moulins, le 5 janvier 1893, après quarante-quatre années d'épiscopat. Il fut, à Paris et à Rome, le condisciple d'Emmanuel, qui parle souvent de lui dans ses lettres.