- PM_XIV_340
- 0+531|DXXXI
- Périer-Muzet, Lettres, Tome XIV, p. 340.
- Orig.ms. ACR, AD 522; V. *Lettres* III, pp. 261-264 et D'A., T.D. 19, pp. 208-209.
- 1 AMOUR-PROPRE
1 AUTEURS SPIRITUELS
1 CAREME
1 COLERE
1 CORRECTION FRATERNELLE
1 DEFAUTS
1 DOUCEUR
1 FRANCHISE
1 HUMILITE
1 LEGERETE
1 LUTTE CONTRE LE PECHE
1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
1 MALADIES
1 MENSONGE
1 PAIX DE L'AME
1 PATIENCE
1 REFORME DU CARACTERE
1 REMEDES
1 RESPECT
1 SIMPLICITE
1 SOUCIS D'ARGENT
1 SOUMISSION DE L'ESPRIT
1 SOUMISSION SPIRITUELLE A JESUS-CHRIST
1 TEMPERAMENT
1 VANITE
1 VIE DE FAMILLE
1 VOYAGES
2 ACHARD, MARIE-MADELEINE
2 CARBONNEL, ANTOINETTE
2 CARBONNEL, ISAURE
2 CARBONNEL, MARIE-VINCENT
2 CART, JEAN-FRANCOIS
2 GARCIN, ADELE
2 GRIOLET, JOSEPH-AUGUSTE
2 JEANNE DE CHANTAL, SAINTE
2 SAINT-ANGE, MADEMOISELLE DE
3 LAVAGNAC
3 MARSEILLE
3 PARIS
3 SETE - A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
- MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
- Nîmes, le 20 juin 1847.
- 20 jun 1847
- Nîmes
- Institution de l'Assomption
- *Madame*
*Madame la Supérieure de l'Assomption*
*n° 76, rue de Chaillot*
*Paris.*
Vous êtes une délicieuse fille, laissez-moi dire le mot en retranchant ce qu’il aurait de trop peu respectueux, et vous me dilatez toujours l’âme, quand vous voulez bien m’écrire comme vous venez de le faire.
Puisque vous me parlez de Soeur M.-Vincent, veuillez lui dire que je viens de causer avec l’abbé Griolet sur ses soeurs, qu’il les trouve beaucoup plus calmes. Mlle Isaure est plus résignée, elle s’est confessée à lui. L’observation de M. Griolet et de Mlle Saint-Ange est que c’est Mlle Antoinette qui est la plus frappée de la séparation. Mlle Isaure eut un accès de fureur, au moment de la réception de la lettre de Soeur Marie-Vincent, mais cette fureur était de la jalousie contre vous. Soeur M.-Vincent comprend très bien la chose. Mlle Antoinette vint pourtant à bout de la calmer. Elles sont en ce moment à la campagne et y seront pour quelque temps.
Mais je veux revenir sur une de vos lettres passées. J’ai reçu celle du 7 au 8 juin, soyez en repos. Mais c’est surtout de celle du 9, jour de votre retraite, que je veux causer avec vous un peu à l’aise. Je recommence ma phrase parce que j’ai été interrompu. Permettez-moi de répondre aux détails de votre lettre. Il me semble que je n’étais rentré que dans les réflexions d’ensemble sur ce qui m’avait frappé à la première lecture.
La nécessité de la plus grande simplicité est ce qui va le mieux à votre nature et à l’ordre de grâce auquel, je crois, Dieu vous appelle. Toute impression qui tendra à développer en vous cette admirable vertu doit être acceptée par vous avec le plus grand soin, je dirai presque avec le plus grand scrupule. Moriamur in simplicitate nostra(1) devrait être de vos devises, en ce sens que la simplicité doit être un de vos buts principaux, et en ce sens aussi que la simplicité doit être comme le tombeau, dans lequel viendront expirer et se détruire toutes vos pensées naturelles. Ce que vous dites sur le besoin qu’on vous donne est d’une vérité parfaite, au moins je le sens ainsi pour moi. Mais qui consent à se faire de semblables aveux, à moins d’un effet de la grâce? Je vous assure que je ne vous trouve point trop raffinée et que je crois bien être capable de comprendre ce que vous me dites sur l’état de vérité ou de mensonge, où vous vous trouvez quelquefois et où vous trouvez les autres.
J’arrive aux reproches que vous me faites comme application, et je vous avoue que, tout en reconnaissant en moi les divers défauts que vous me signalez, je leur attribue une autre cause que le principe artificiel qui est en moi, ou bien je ne comprends pas bien la manière dont vous déduisez la conséquence. J’ai ces défauts, parce que je les ai et que ce qui fait qu’un défaut est défaut, c’est qu’il n’a pas une cause raisonnable ni de rapport raisonnable avec rien de bon. Ces défauts me rendent artificiel, mais je ne les ai pas, parce que je suis artificiel. Ce que vous m’engagez à faire, avant de me livrer au mouvement, est parfaitement vrai. Sous ce rapport, je puis vous assurer que je fais des efforts, lesquels ne donnent pas toujours de grands résultats, mais en donneront, je l’espère, un jour.
Je suis charmé de ce que vous me dites au sujet de vos impressions sur vos dispositions de souplesse, humilité, etc., que c’est un état dans lequel Dieu veut vous établir, afin d’aller ailleurs. C’est ce que je vous ai écrit, si je ne me trompe, de Lavagnac au mois de janvier dernier, ou bien pendant le Carême; c’est l’une de ces deux époques. J’entre très fort dans ce que vous dites que vous n’acceptez point d’être le petit chien de luxe; seulement il me semble que je ne m’étais pas fait bien comprendre, lorsque je vous en parlai. Car, d’une part, vous ne devez être la propriété des fantaisies de qui que ce soit; ce serait un crime, sous quelque rapport que vous l’envisagiez, excepté par rapport à Jésus-Christ, aux fantaisies de qui il faut vous abandonner, parce que la notion de Jésus-Christ et celle de fantaisie sont antipathiques.
Ainsi, quoique je ne veuille pas me justifier de certains reproches d’amour- propre que vous m’avez faits, lorsque je vous racontais certaines observations que j’avais cru devoir faire à mon évêque, il vous est arrivé de me blâmer; et cependant, il me semblait très fort que j’étais le chien de ferme qui allait à la bonne pour le plus grand bien du maître commun. Je dis ceci pour entrer dans le reproche que vous vous faites d’avoir mis trop peu de patience dans les justes reproches que vous croyez devoir me faire pendant le Carême. Il y a eu, je crois, de ma faute dans l’occupation que j’ai pu donner de moi à certaines gens. Je vous promets d’y mettre ordre, précisément par cette grande simplicité, avec laquelle je veux aller. Puis, laissez-moi vous dire que notre évêque a fait souvent la même observation, non pas seulement à cause de moi, mais en général à propos du tempérament méridional, qui est une chose merveilleuse sous ce rapport.
Votre entêtement, ma chère fille, peut être une excellente qualité, si vous ne laissez entrer chez vous que de bonnes choses. Et puisque vous avez la possibilité de vous fermer à certaines idées ou impressions, prenez donc la résolution bien forte de ne plus admettre rien qui ne porte les couleurs de la douceur et de l’humilité. Avec vous, ma chère enfant, il me semble que je n’ai depuis bien longtemps aucune disposition de vanité voulue; et si c’est chez moi affaire d’instinct, comme vous ne pouvez m’en vouloir, vous pouvez vous en servir comme moyen d’humiliation, qui n’a rien d’humiliant en soi, pas plus que telle disposition chaude ou froide de la température. Vous êtes un excellent avocat du diable et vous en remplissez parfaitement le rôle à mon égard.
J’ai déjà, dans ma lettre précédente, répondu à votre dernière question. Oui, ma chère fille, j’accepte de grand coeur le dépôt que vous voulez me confier, mais à une condition, c’est que vous croirez toujours à mon intention de respect pour tout ce qui vous touche, et, d’autre part, que si les faits semblaient vous donner quelque impression contraire, vous ne leur permettrez pas d’entrer dans votre coeur, comme la goutte d’huile dans le parquet, avant de vous en être expliquée.
Vous voulez savoir de mes nouvelles? Je ne vais pas très bien. L’irritation s’est portée sur les entrailles. On m’a conseillé des bains avec de l’amidon. Je crois que des bains sans amidon me feront aussi bon effet.
Je ne réponds rien à votre lettre du 16, parce que je veux pouvoir dire deux mots à Soeur M.-Vincent. Faut-il que je parle à la famille de Soeur M.Madeleine? Il me semble que je puis commencer à en dire quelque chose à sa cousine, Mlle Adèle Garcin, qui, je crois, l’accompagnera à Cette ou à Marseille. Je vous enverrai les explications de sainte Chantal, mais on vient de les imprimer. Si vous les voulez en propriété, on vous les procurera à la Visitation de Paris; mon exemplaire ne m’appartient pas. Ma résolution bien arrêtée, autant qu’elle peut l’être, c’est de venir à Paris au mois de décembre. Priez bien le bon Dieu. Je suis à traiter une grande affaire d’argent, dont je vous parlerai à ma première lettre.