DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.460

may 1861 Rome BARNABO Cardinal

La réponse du cardinal à la lettre où il lui soumettait son projet de se charger de l’éducation ecclésiastique de quelques jeunes syriens ne lui étant pas parvenue, il lui soumet à nouveau sa pensée. – Il la résume comme suit: « Mon but est d’élever quelques jeunes syriens pour l’état ecclésiastique, avec les ressources pécuniaires dont je crois pouvoir disposer et sous la direction de la Propagande dont je réclame les conseils et quelques grâces spirituelles ».

Informations générales
  • DR03_460
  • 1610
  • DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.460
  • Cop.ms. ACR, AP 4; D'A., T.D. 40, n. 2, pp. 110-112.
Informations détaillées
  • 1 CLERGE ORIENTAL
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 CONGREGATION DE LA PROPAGANDE
    1 EDUCATION RELIGIEUSE
    1 ETUDES ECCLESIASTIQUES
    1 GOUVERNEMENTS ADVERSAIRES
    1 HIERARCHIE ECCLESIASTIQUE
    1 INSTITUTS RELIGIEUX
    1 LITURGIES ORIENTALES
    1 RITE GREC
    1 RITE SYRIEN
    1 SEMINAIRES
    2 ABDOU, JOSEPH
    2 ABDOU, PHILIPPE
    2 PAYAN d'AUGERY, FRANCOIS
    2 VALERGA, GIUSEPPE
    3 MARSEILLE
    3 ROME
    3 SYRIE
  • Au cardinal Barnabo, préfet de la Propagande
  • BARNABO Cardinal
  • [Rome], mai 1861.
  • may 1861
  • Rome
La lettre

Monseigneur,

J’avais eu l’honneur d’écrire à Votre Eminence, afin de lui parler de mon projet de me charger de l’éducation ecclésiastique de quelques jeunes Syriens(1). Votre Eminence a eu la bonté de me répondre, à ce qu’elle m’a dit, mais sa lettre ne m’étant pas parvenue, je prends la liberté de lui soumettre ma pensée, comme elle-même a bien voulu m’y inviter(2).

1° Il m’a paru que les massacres et les dévastations dont les Syriens ont été l’objet, auraient pour résultat de laisser, d’ici à quelques années, de bien grandes lacunes dans les rangs du clergé indigène, et toutefois il devrait être bien utile d’avoir des prêtres, à qui la facilité de parler la langue nationale permettrait de faire un bien que les missionnaires étrangers doivent accomplir difficilement au même degré.

2° En me chargeant d’un certain nombre d’enfants, je leur facilite la possibilité de parler entre eux la langue maternelle, et, en leur faisant terminer leur éducation en France, je leur assure une instruction analogique(3) supérieure à celle qu’ils peuvent trouver chez eux.

3° Peut-être, avec de pareils sujets, serait-il possible de fonder un jour un séminaire sur les lieux, comme après le concile de Trente on en fonda en Europe. Mais ceci est une idée à laquelle je me permets de croire qu’il n’est pas temps de s’arrêter; je l’indique seulement.

4° Quoi qu’il en soit, un groupe de prêtres instruits ne pourrait faire que beaucoup de bien. Mais qui ordonnera ces jeunes gens? Je réponds que mon évêque ayant approuvé mon projet, je ne vois pas pourquoi lui ou son successeur refuserait de les ordonner, surtout si, comme je le propose, on les met sous la protection de la Propagande, dont je désire avant tout suivre la direction.

5° Quant aux évêques syriens sous la juridiction desquels ils seront placés un jour, c’est à la Propagande à voir ce qui est préférable. Les dispersera-t-on dans les pays syriens, ou bien les réunira-t-on en association qui formera un corps de missionnaires diocésains? Le temps seul peut permettre une solution.

6° Votre Eminence m’a demandé quel règlement je leur donnerai. La réponse est facile: ou bien j’accepterai sans difficulté celui que me donnera la Propagande, ou bien pour commencer ils suivront le règlement du collège au sein duquel ils vivent. Dans ce cas, l’expérience inspirera successivement les diverses modifications que l’on croira les plus utiles.

7° Quant aux moyens d’existence, j’espère avec la fortune qui m’est échue pouvoir subvenir aux frais de l’éducation de huit jeunes gens. Si ce plan que je propose se développe, je m’adresserai à l’oeuvre des Ecoles d’Orient, qui, j’ai lieu de le penser, favorisera cette idée, puisqu’on me propose de me charger d’un orphelinat de jeunes garçons pour la classe inférieure.

8° Je dois faire observer à Votre Eminence que, pour ne pas aller trop vite, mon intention actuelle est de me charger seulement de huit jeunes gens(4). Plus tard, si Dieu bénit l’entreprise, je serais heureux de faire quelque chose de plus. Peut-être les événements prouveront-ils la nécessité de procéder autrement, peut-être les mauvaises dispositions du gouvernement français envers les Congrégations religieuses ne permettront-elles pas d’aller plus avant. Sur toutes ces questions, il faut rester dans une réserve que semble imposer la prudence.

Je me résume. Mon but est d’élever quelques jeunes Syriens pour l’état ecclésiastique, avec les ressources pécuniaires dont je crois pouvoir disposer, et sous la direction de la Propagande dont je réclame les conseils et quelques grâces spirituelles(5).

Notes et post-scriptum
1. Par sa lettre du 26 janvier (*Lettre* 1553). Voir aussi *Lettre* 1549 et note.
2. Le 18 mai, il semble déjà avoir vu le cardinal Barnabo (voir *Lettre* 1607).
3. Il faut sans doute lire *théologique*.
4. Six petits Syriens furent amenés à Nîmes par M. Abdou, curé arménien de Marseille, le 10 mai (la lettre de l'abbé Payan d'Augery, directeur de l'Oeuvre des Ecoles d'Orient à Marseille, que ce prêtre devait remettre au P. d'Alzon, est datée du 9, avec un post-scriptum de 11 h. du soir). Le P. d'Alzon a donc dû les voir avant son départ pour Rome. A ces six enfants il faut ajouter Joseph Abdou, qui se trouve à Nîmes depuis le début de l'année. Le huitième est sans doute un jeune cousin du curé pour lequel M. Payan d'Augery sollicitait l'hospitalité du collège de l'Assomption.
5. Cette lettre a dû être remise par le P. d'Alzon lui-même lors de son séjour à Rome. Le cardinal Barnabo y répondit par une lettre, du 17 août 1861 (DK 55, *Collectanea*, n° 9, p. 10). Il dit que Mgr Valerga, patriarche de Jérusalem et pro-délégué apostolique de Syrie, est du même avis que lui. Tout projet qui tend à améliorer le clergé oriental sous le double rapport de l'instruction et des vertus sacerdotales ne peut qu'être encouragé. La difficulté du rite à suivre n'en est pas une: on demande au S. Siège pour les élèves la faculté de suivre le rite latin durant leur formation intellectuelle. Pour le reste, le P. d'Alzon n'a qu'à s'adresser à Mgr Valerga.